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traient impitoyables envers qui l’avait à son gré insuffisamment régalé en proportion de ses ressources. Bien entendu, la conséquence d’un semblable état de choses fut la révolte et la coalition des riches. Leur faction sur la fin de la guerre du Péloponnèse visa à détruire le régime démocratique et à conclure à tout prix une paix durable. Par malheur, il ne s’en tinrent pas à ce programme. Impuissants à former un gouvernement, ils s’abaissèrent à la trahison en traitant avec Lysandre, le général Spartiate. Pour indiquer il est vrai à quelles folies s’était laissé entraîner la démocratie athénienne, il suffit de mentionner la proeisphora, innovation datant de 360 environ. Trois cents citoyens considérés comme les plus riches y furent assujettis. Ils devaient, en cas d’eisphora (qui était un impôt de répartition), faire à l’État l’avance immédiate de la totalité de l’impôt quitte à se faire ensuite rembourser en détail par les petits contribuables. Naturellement les tribunaux n’aidaient pas au remboursement. Si l’on ajoute qu’un citoyen même appauvri n’était rayé de la liste des trois cents qu’après avoir découvert lui-même celui qui l’y devait remplacer, on admettra que la proeisphora dépasse en tyrannie et en iniquité fiscales tout ce qui s’est jamais vu à aucune époque et chez aucun peuple civilisé.

Le tributum ex censu des Romains ressembla trait pour trait à l’eisphora des Grecs avec cette diflérence que Rome s’étant lentement et continuement enrichie à la différence d’Athènes qui s’appauvrit de façon assez régulière pendant des siècles et qui de plus avait eu au début de fortes ressources minières à sa disposition, le tributum finit par disparaître et être avantageusement remplacé par un trésor de guerre formé avec les contributions des vaincus. Vers 406 avant Jésus Christ, la solde militaire fut établie Le tributum en fut la conséquence. Il pesa expressément sur les biens immobiliers, urbains et ruraux ; on ne saurait dire avec certitude si les biens mobiliers en furent exemptés. Le droit de contrôle des censeurs fut illimité ; ils fixaient le montant de la contribution à leur idée et sans appel. Mais à Rome comme à Athènes, quoique dans un esprit différent, celui qui estimait trop bas son avoir réduisait sa part d’influence ; il en résultait qu’en général le citoyen était peu porté à frauder pour se soustraire au paiement de l’impôt. Une remarque très intéressante faite par M. Paul Guiraud dans l’ouvrage cité plus haut c’est qu’au début les pauvres furent exemptés à la fin du tribut et du service.