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savoir d’ailleurs qu’elle n’en a pas l’obligation. L’Angleterre est maîtresse de cette flotte et serait libre de l’appeler, en temps de guerre, où bon lui semblerait. Cette combinaison chagrine les Australiens : ils veulent une marine de guerre pour eux seuls, et, insoucieux de ce qu’elle coûtera, ils s’obstinent à la réclamer. Ils l’obtiendront.

Cela ne veut pas dire que ce jour là l’Australie cessera d’être « loyale », mais elle aura quand même rompu un des liens qui l’attachent à l’empire. Cependant qu’elle le veuille ou non — M. Biard d’Aunet nous assure qu’elle le veut : c’était déjà là notre avis — elle est retenue dans l’orbite de la mère patrie par un lien solide : l’intérêt. Celui-là subsistera longtemps. Il en résulte que les rapports réciproques de l’Australie et de l’Angleterre ne soulèvent pas de diflicultés sérieuses.

Il en est autrement des rapports de l’Australie avec les étrangers. Possédant vis à vis d’eux des droits et des devoirs, elle n’est pas davantage qualifiée pour faire respecter ces droits que responsable de l’accomplissement de ces devoirs. Le gouvernement anglais est ainsi harassé de réclamations des gouvernements étrangers contre l’insociabilité de l’Australie plaçant ses lois extravagantes au-dessus du droit des gens, en même temps qu’il se trouve en butte aux sollicitations du Commonwealth contre l’action des étrangers dans l’océan Pacifique sud. Cette situation juridique semble inextricable en fait, et pourtant, en y réfléchissant, on la trouve parfaitement normale. N’étaient les égarements de la politique australienne, elle n’offrirait que des avantages.

Ces égarements sont assurément passagers. Nous avons confiance que le « bon sens anglais » en aura raison tôt ou tard. Il en sera de même à l’intérieur du Commonwealth. La nation australienne s’est montrée aventureuse, obstinée dans ses erreurs : cette attitude a certainement nui à son développement normal. Mais, « elle est assez jeune pour que les leçons de l’expérience puissent, avant d’être trop rudes, lui devenir profitables ».

Elle est « robuste et saine ». « Si, comme l’ont fait les Américains au siècle dernier, elle met au premier plan le travail et l’agitation politique au dernier, un bel avenir est devant elle. Cette Aurore australe peut devenir pour les vieilles nations, selon qu’elles seront actives ou négligentes, un bienfait ou un danger. » La France occupe aux antipodes de riches domaines. Ses acheteurs de laine sont les meilleurs clients de l’Australie. Elle doit