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L’AUSTRALIE DE NOS JOURS

Elle a donné lieu bien souvent à d’inénarrables complications. « Je l’ai vu appliquée, dit M. Biard d’Aunet, à un sujet allemand, fils de père allemand, qui, en plus de sa langue nationale, parlait le français et l’anglais. Il ne réussit pas à faire une dictée en grec, fut, de ce chef, condamné à six mois de prison puis expulsé et rapatrié en Allemagne peu de jours après sa condamnation ». Inutile d’ajouter que ces dispositions inhospitalières ont été encore aggravées, s’il est possible, contre les gens de couleur. Une loi spéciale — le Pacific islands Labourers Act — a même ordonné le rapatriement dans un délai de cinq années (depuis 1901) des indigènes polynésiens engagés dans les plantations tropicales du Queensland. Ces indigènes remplissant un rôle impossible à tenir par les blancs, l’unique effet de la loi fut de ruiner une industrie particulièrement florissante.

D’une façon générale, la suppression de l’immigration fut désastreuse pour le pays. Considérant uniquement le taux des salaires, les ouvriers ne l’ont pas immédiatement compris. La société entière en a souffert. S’étant privé des auxiliaires utiles que lui procurait la présence de quelques milliers de Chinois, de Canaques et d’Indous, « l’homme blanc, au lieu de s’élever au niveau des fonctions supérieures qui lui seraient nécessairement réservées et qu’une mise en œuvre plus pratique des immenses ressources du pays multiplierait, est abaissé à celui des fonctions inférieures à son intelligence et à ses aptitudes. » Ainsi la majorité de la nation s’emploie « à des travaux de force ou de patience, mécaniques, parfois répugnants, mais nécessaires, qui ne réclament ni intelligence ni technique de métier, et font de l’homme, pendant huit heures chaque jour et cinq jours par semaine, une machine de production médiocre, fragile, peu régulière et pourtant coûteuse. »

Sans parler des répercussions fâcheuses de ce système sur les dispositions intellectuelles et morales des populations, il contrarie évidemment l’intérêt général du pays. Ces considérations échappent aux socialistes. Ayant réalisé l’isolement de l’Australie, ils ont simplement préparé leur terrain d’expérience. Malheureusement leur attitude extravagante, ayant porté ses premiers fruits, perd tous les jours la sympathie d’une fraction nouvelle de l’opinion publique. On n’agit pas impunément, comme ils l’ont fait, contre la nature et le bon sens. Une réaction s’esquisse. Certains de leurs chefs eux-mêmes, ayant passé par le pouvoir, en sont