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LES JOURNALISTES ANGLAIS EN ALLEMAGNE

politique traditionnelle de l’Angleterre a été orientée d’une manière invariable contre la puissance qui visait à l’hégémonie continentale. Tel a toujours été pour le grand premier rôle terrien de la vieille Europe le revers de la médaille. On semble redouter Outre-Rhin la catastrophe maritime et industrielle qui résulterait pour l’empire d’un conflit armé avec les flottes britanniques. Les journaux politiques ont bien émis, il est vrai, la théorie de la France otage, mais les revues militaires et les hommes du métier parlent des succès de cette combinaison dans des termes infiniment mesurés. Le résultat de tout ceci est une certaine inquiétude et un nervosisme évident. Mais il faut faire contre fortune bon cœur et l’on sourit aux représentants de la presse anglaise. La risette du Docteur Dernburg est pleine d’onction. Il parle avec admiration du développement de la civilisation sur le sol britannique, développement qu’aucune invasion étrangère n’est venu troubler. Il insiste sur ce fait pour mieux établir le contraste avec l’histoire de l’Allemagne, sur le territoire de laquelle ont passé en maîtres Espagnols et Suédois, Polonais et Russes, Français et Anglais. Il cite le duc d’Albe, Gustave Adolphe, Marlborough, Turenne et Napoléon. Il rappelle la guerre pour l’indépendance conduite de concert avec Wellington et attire l’attention de ses hôtes anglais, lorsqu’ils iront de Munich à Francfort, sur le village de Dettingen où Marlborough fut victorieux.

Une nation dont le sol a été ainsi foulé aux pieds ne doit compter que sur elle-même et sur sa force soigneusement entretenue et sa discipline, non seulement pour résister à un ennemi, mais à une coalition d’ennemis. Aussi ne doit-on pas s’étonner qu’une proposition tendant à diminuer cette force défensive soit mal accueillie d’une telle nation. Le docteur Diernburg affirme catégoriquement que le désir ou la volonté d’attaquer qui que ce soit sont très éloignés de l’âme allemande. On n’en saurait donner de meilleure raison que celle-ci : une nation arrivée à un développement industriel et économique aussi considérable que celui auquel l’Allemagne est parvenue n’est pas prête à risquer les produits de son labeur dans de dangereuses aventures.

L’influence étrangère qui a été la plus profonde sur l’Allemagne, prétend-il, est celle de l’Angleterre, au triple point de vue de la philosophie, de la littérature et de la politique. Et notre auteur en tire cette conclusion que plus les deux nations ont de rapports et