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avait commencé et d’autant plus rapide que ces princes musulmans, malgré qu’ils eussent gouverné avec sagesse et tolérance, étaient toujours demeurés aux yeux des populations hindoues, des étrangers. L’Islamisme ne s’était point implanté autour d’eux. Les rajahs réduits en vasselage par les empereurs mogols s’étaient plus d’une fois révoltés. D’autre part, Aureng Zeb avait vu se dresser devant lui un péril nouveau : les Mahrattes. Habitants des montagnes qui s’étendent le long de la côte entre Surate et Goa, les Mahrattes avaient longtemps vécu de brigandage ; puis un chef énergique du nom de Sivadji les avait disciplinés en une nation ambitieuse ; et Aureng Zeb ne pouvant les réduire avait dû traiter avec Sivadji. Quand Dupleix, si habile à profiter des divisions des princes hindous pour les opposer les uns aux autres, eût étendu son protectorat sur le Dekkan, les Mahrattes qui avaient traité avec lui prirent volontiers le chemin du Bengale où ils molestèrent les établissements anglais ; ils finirent d’autre part par s’emparer de Delhi et l’on peut croire alors (Dupleix venait de tomber) qu’ils arriveraient à étendre leur domination sur l’Inde entière et à en chasser les Anglais. Une coalition des princes musulmans du nord, anciens vassaux ou gouverneurs émancipés des provinces de l’empire mogol, les arrêta. Avec l’aide d’Ahmed-Abdallah, fondateur de la dynastie afghane moderne, ces princes remportèrent sur l’année mahratte la célèbre victoire de Panipat (1761). Le centre de la puissance mahratte demeura donc dans leur région d’origine ; ils y formèrent une confédération dont Pounah fut la capitale. Leur organisation politique était défectueuse ; le souverain régnait sans gouverner, le pouvoir appartenant à une sorte de premier ministre héréditaire. Il arrivait d’ailleurs à l’empire mahratte ce qui était arrivé à l’empire mogol ; de hauts fonctionnaires s’émancipaient partiellement, fixant dans leur famille l’administration provinciale qui leur avait été confiée à titre individuel. Ainsi étaient nées les indépendances relatives du Nizam d’Haïderabad, du Guikowar (Goudzerat), de Sindhia, de Holkar, des rajabs du Berar et de l’Aoudh. Si respectables que fussent encore leurs forces militaires, les Mahrattes devenaient donc moins redoutables aux Anglais. Mais alors parut (dans le sud de l’Inde cette fois) un troisième empire dont le destin allait décider du sort de l’Inde. Entré très jeune au service du rajah de Mysore, Haïder Ali, petit-fils d’un derviche avait pris un tel ascendant sur ses compagnons d’armes qu’il avait fini par sup-