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LE MINISTÈRE AMÉRICAIN DU TRAVAIL

le premier le courage de renoncer à de pareilles pratiques mais, jusqu’ici on n’avait peut-être jamais vu aux États-Unis un groupe administratif aussi complètement soustrait aux influences politiques que ne l’est le ministère du Travail. Les fonctionnaires qui forment ce groupe sont des hommes jeunes, énergiques, pleins d’entrain et de bon vouloir, ne s’occupent pas même de savoir s’ils sont inscrits dans le parti républicain ou dans le parti démocrate, la plupart sont des gradués des grandes universités ; d’autres ont acquis dans leurs métiers respectifs une compétence technique.

Corporations et manufactures.

Le ministère du Travail qui est en même temps un ministère du Commerce est divisé en « bureaux » correspondant à ce qu’en France on appellerait des directions. Le premier de ces bureaux, l’un des plus intéressants, est le bureau des corporations. Son rôle est de conduire des enquêtes incessantes sur l’organisation, le fonctionnement et la conduite des entreprises corporatives — les chemins de fer exceptés — et de publier, s’il y a lieu, les documents en résultant. Le chef de bureau, qui porte le titre de « commissioner », a le droit de citer en témoignage les personnes susceptibles d’éclairer toute enquête et il peut exiger la production de tous papiers et écrits provenant de ces entreprises. Ce sont là des pouvoirs considérables et auxquels en d’autres pays on ne tolérerait peut-être pas aussi bénévolement que le gouvernement pût avoir recours. C’est par le bureau des corporations, qu’ont été conduites la fameuse enquête de mars 1906 sur l’industrie des viandes conservées et, en mai 1906, celle sur les fraudes dans le transport du pétrole. L’une et l’autre ont déterminé une action judiciaire et provoqué des modifications ou un complément à la législation. Le bureau apparaît donc par certains côtés comme une annexe de la justice et pourtant il n’est pas tant destiné dans l’esprit de ceux qui le dirigent à découvrir et à poursuivre les fraudes qu’à porter les incorrections à la connaissance de l’opinion, à la mettre en garde et à déterminer les mesures législatives qu’il serait utile de prendre. C’est un rôle très original et peu en rapport avec les coutumes européennes. L’expression « faire la lumière » est courante dans les parlements du Vieux-monde, mais il n’est aucun pays, pas même l’Angleterre, où l’on ait eu l’idée d’instituer pour cette besogne un rouage permanent au