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REVUE POUR LES FRANÇAIS

Une Administration éparpillée.

Le ministre actuel n’a pas les mêmes titre que M. Viviani ; il en a d’autres. C’est un négociant doublé d’un homme de loi, dualité assez rare même aux États-Unis et qui vaut d’être citée. Mais là ne se bornent pas les compétences de M. Straus. Il fut encore diplomate ayant à deux reprises représenté son pays auprès de la Porte Ottomane. Par la suite il devint membre de la Cour d’arbitrage de la Haye et président du Board of trade and transportation de l’État de New-York. De sorte qu’il est vraiment difficile de concevoir une carrière mieux remplie que la sienne au point de vue des labeurs d’ordres très variés qui l’attendent dans son poste actuel. Un de ses premiers succès sera sans doute d’unifier matériellement autant que faire se pourra l’étonnante organisation qui vient d’être placée sous ses ordres. Elle est, en effet, éparpillée en plus de dix maisons ou logements loués au hasard à travers Washington pour un loyer d’ensemble qui, dit-on, dépasse trois cent mille francs. Encore la bibliothèque est-elle jusqu’à nouvel ordre campée dans un hangar. M. Metcalf, prédécesseur du ministre actuel, se plaignait, bien entendu, d’un tel état de choses et il estimait que des sommes presque égales au chiffre du loyer global se trouvaient gaspillées chaque année par suite des dépenses qu’entraînaient la correspondance entre les bureaux, les pertes de temps, les erreurs de transmission, etc… Voilà qui n’est guère pratique. Sans doute toutes les capitales n’ont pas un palais archiépiscopal à utiliser gratuitement ; et beaucoup, si elles l’avaient, regarderaient à s’en servir en dépossédant, au préalable, celui qui l’occupe. Mais Washington n’est pas tellement surpeuplé qu’on ne puisse y trouver l’espace nécessaire à l’édification des bâtiments exigés par un des services publics les plus importants.

Autant le cadre est impropre, autant les cadres méritent d’être signalés par leur excellence. C’est une belle et salutaire tendance du gouvernement américain d’abandonner peu à peu cette déplorable conception par laquelle toutes les fonctions se trouvaient dépendre de la politique. Même les facteurs ruraux changeaient naguère avec le parti au pouvoir. Les Américains étaient malvenus, après cela, à se lamenter au sujet de leur mauvaise administration. N’était-ce pas leur faute ? Le président Cleveland eut