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L’ART ARABE

trie y devinrent de simples épures. Ainsi « tracer autour d’un cercle six pentagones égaux » ou bien « assembler autour d’un cercle six carrés ou six hexagones réguliers » ne constituent pas des démonstrations mathématiques à proprement parler, mais plutôt des exercices graphiques à l’usage des ingénieurs-architectes.

Ayant hérité des Coptes une répugnance extrême à copier la nature, répugnance qui répondait d’ailleurs aux inspirations du Coran, les architectes arabes se trouvèrent fort dépourvus en face de besoins décoratifs qu’engendrait le luxe inouï d’un Haroun-al-Raschid. Jusqu’alors les murailles des mosquées d’abord blanchies à la chaux puis parées de quelques revêtements de marbre n’avaient pas réclamé la surcharge d’une ornementation dispendieuse. Dès qu’il fallait les orner, n’était-il pas naturel que le principe en fut cherché là ou gisaient à la fois la préoccupation mentale du moment et l’accoutumance préalable des doigts ? Ainsi la géométrie sous toutes ses formes se trouva mise en contribution par l’art. Il est juste d’ajouter qu’à défaut d’un symbolisme philosophique improbable, une telle décoration convenait au tempérament arabe, fait de somnolences coupées de sursauts passionnés. En effet, arrêtez vos regards sur le dédale de ces décors inexorables et compliqués : toute une série de formes surgissent les unes après les autres, images à la fois nettes et fugitives susceptibles de conduire la méditation errante de l’Arabe jusqu’à la béatitude de l’extase.

L’art arabe évolua tout naturellement. On peut en fixer clairement les grandes étapes. Haroun-al-Raschid régnait au temps de Charlemagne ; c’est alors que s’édifiaient pour lui ces monuments fabuleux dont malheureusement aucun vestige ne nous est resté. En 883 surgit à l’autre bout de l’Europe la fameuse mosquée de Cordoue. Presqu’en même temps le gouverneur de l’Égypte, Touloun s’émancipant du joug abasside y instaure une dynastie nouvelle et construit — avec le concours d’un architecte copte — la mosquée de Kotayeh. Puis cent ans plus tard la tribu qui possède Kairouan et descend de Fatimah, fille du prophète, s’empare de l’Égypte et son chef fonde le Caire. Enfin après les croisades, les sultans Baharites atteignent de nouveau au sommet de l’éclat et de la prospérité. À chacune de ces phases correspondent des modifications dans le détail de l’inspiration et des perfectionnements dans la technique. Les Fatimistes par exemple adoptent la coupole et la voûte en berceau. Mais à travers ces modifications