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ment matériel et mental dont souffraient les civilisations avoisinantes de sorte que les circonstances de fait ont joué dans ce triomphe un rôle non moins considérable que les caractères de la doctrine elle-même. Quoi qu’il en soit, l’orgueil d’un succès éclatant ne pouvait manquer de se refléter dans les actes des premiers Khalifes. De là sortirent les mosquées éblouissantes.

De même que Mahomet avait sans scrupule requis les services d’un chrétien, de même ses successeurs n’hésitèrent pas à y recourir à leur tour. Ce fut heureux ; ils eussent sans cela imité ceux de leurs frères qui, n’ayant point d’architectes à portée, mais seulement des débris de monuments anciens en utilisèrent les colonnes en les plantant bravement à l’envers, le chapiteau à terre et le piédestal en l’air. Les Coptes se trouvaient là pour redresser ces velléités déplorables. Ils furent les premiers, les principaux — on pourrait presque dire les seuls intendants artistiques de l’Arabe. Ce dernier s’en remis entièrement à eux pour commencer et plus tard ne cessa de s’inspirer de leurs méthodes et de leurs idées, même en y introduisant du sien. Le Copte était un mystique, un rêveur, un exalté en réaction contre Byzance dont les formules l’opprimaient.

Il y avait longtemps qu’il s’était constitué une architecture conforme à ses instincts et d’où se trouvaient bannis la coupole et l’arc de plein cintre issus du génie byzantin. Son architecture à lui présentait ces caractéristiques contradictoires d’une silhouette extérieure en terrasse et d’un dessin intérieur en ogive. L’arc brisé aigu avait toutes ses préférences, mais, en même temps, il prétendait ramener le monument aux lignes horizontales des anciens temples. L’arc ogival était-il une nécessité et servait-il à soutenir le toit et à éviter des charpentes qui ne pouvaient plus se faire en pierre comme au temps des Pharaons faute de main-d’œuvre et d’argent et qui ne pouvaient pas non plus faire se faire en bois, le bois étant trop rare en Égypte ? Ou bien répondait-il à une aspiration profonde de l’âme et symbolisait-il quelque extase mentale ? On peut en disserter à loisir.

Les Arabes ne partageaient pas l’hostilité des Coptes à l’égard des formes byzantines ; l’arc ogival leur convenait très bien mais le plein cintre et la coupole leur eussent convenu non moins bien à preuve qu’on vit un Khalife couronner la mosquée d’Omar à Jérusalem d’un magnifique dôme de cuivre enlevé à une église de Baalbeck. Et quand El Oualid fils d’Abdel Melek voulut restaurer