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L’AVENIR DE L’EMPIRE BRITANNIQUE

et Kiel sont insuffisants et incommodes. Nouveau motif pour les Allemands ; on peut dire même, nouvelle nécessité pour eux d’acquérir les grands ports des Pays-Bas s’ils veulent jouer le rôle de puissance maritime. Or, ils y sont absolument déterminés ; leur budget naval est de plus en plus dirigé dans ce sens. Dans quelques années, l’Allemagne possédera vingt cuirassés d’environ 20.000 tonnes, plus grands et plus puissants que le Dreadnought. Elle défie résolument la suprématie natale de l’Angleterre. Il faut donc que contre elle aussi, la Grande-Bretagne maintienne sa suprématie, d’autant plus que depuis Frédéric-le-Grand l’Allemagne s’est toujours efforcée d’entretenir de très amicales relations avec les États-Unis et tel moment pourrait arriver où l’Amérique soutiendrait la politique expansionniste de l’Allemagne.

Ainsi donc, la Grande-Bretagne, si elle veut assurer la permanence de son empire, doit maintenir pour sa flotte la règle du Two-Power Standard. Mais les ressources lui permettent-elles de remplir ce devoir ?

La Grande-Bretagne ne possède plus le monopole de l’habileté maritime. Les Allemands et les Américains ont donné des preuves de leur talent comme marins et comme constructeurs et il en résulte que c’est la bourse la mieux garnie qui pourra construire la flotte la plus puissante. Dès lors, la question de savoir si la Grande-Bretagne sera capable d’entretenir une flotte susceptible de faire face à la fois aux flottes allemande et américaine, est purement financière.

Son habileté à résoudre cette question est très douteuse ; il n’est même pas certain qu’elle puisse continuer longtemps à construire plus de navires que l’Allemagne, en dépit des affirmations contraires, officielles ou officieuses. On sait généralement que les États-Unis sont plus riches que l’Angleterre, mais on ignore si dans une lutte pour la suprématie maritime, l’Allemagne serait capable de se montrer supérieure à la Grande-Bretagne. Au point de vue de la population on peut dire, en tenant compte de toutes les considérations accessoires, qu’en puissance d’hommes, la Grande-Bretagne est à l’Allemagne comme 4 est à 7. D’autre part, toutes les industries allemandes sont très florissantes, à tel point qu’en dépit de son accroissement considérable de population et d’un courant d’immigration supérieur au courant d’émigration, l’Allemagne souffre périodiquement du manque d’ouvriers. En Angleterre, au contraire, en dépit d’un accroissement de population