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L’AVENIR DE L’EMPIRE BRITANNIQUE

Une nécessité de premier ordre pour ledit empire consiste dans le maintien de sa suprématie maritime ; qu’il la perde et c’en est fait de lui. Ceci est évident par soi-même et n’a pas besoin de démonstration. Or la politique navale de l’Angleterre est basée sur l’entretien d’une flotte égale en puissance à la force combinée des deux plus nombreuses flottes étrangères. C’étaient jusqu’ici celles de la France et de la Russie. Mais, à l’heure actuelle, les relations avec ces deux pays sont devenues amicales et il convient de se demander d’abord si la Grande-Bretagne est dans l’obligation d’entretenir une flotte assez forte pour faire face aux flottes réunies des États-Unis et de l’Allemagne et ensuite d’examiner si les ressources de la Grande-Bretagne sont suffisantes pour lui permettre un semblable effort.

Pour bien comprendre la pensée de l’auteur, il convient de noter dès à présent que lorsqu’il dit « Grande-Bretagne » il désigne seulement la métropole. Il est nécessaire, pour répondre aux questions qui viennent d’être posées, d’examiner quelles sont les relations actuelles des États-Unis et de l’Allemagne avec l’Angleterre et quelle sera leur évolution probable.

Il y a peu de temps, les États-Unis et l’Allemagne étaient uniquement des puissances continentales principalement occupées d’agriculture, et elles échangeaient le surplus de leurs productions en céréales, leurs viandes, leurs bois et leurs matières brutes, contre les produits des manufactures anglaises. Mais depuis une vingtaine d’années, une politique de protection a transformé le régime économique de ces deux pays. Aujourd’hui, non seulement ils sont à même de fournir leurs propres marchés des produits de leurs manufactures, mais ils exportent en quantités considérables leurs produits manufacturés dans le monde entier. Du même coup, ils ont organisé une politique d’expansion maritime et coloniale dans le but de s’assurer à la fois et la possession des matières premières et des débouchés pour l’excédent de leurs manufactures. Dans la France et dans la Russie, la Grande-Bretagne n’avait affaire qu’à des rivaux mus par l’ambition de colorer la carte. Mais l’Allemagne et les États-Unis sont mus par un motif infiniment plus puissant et plus redoutable : la nécessité écono mique.

Les États-Unis, devenus une nation manufacturière, veulent aussi être une nation maritime et coloniale de premier ordre. Bientôt, en raison d’une loi de navigation discutée récemment au