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coïncidaient précisément avec l’éducation des indigènes et la mise en valeur du pays. Ils se désintéressèrent également de l’une et de l’autre. Nous ne pouvons pas ici en témoigner par de nombreux détails. Bornons-nous donc à constater les résultats acquis lorsque les Philippines, en 1899, cessèrent d’appartenir à la couronne d’Espagne après trois siècles et demi de domination.

Une grande partie des territoires étaient encore inexplorés : les Espagnols n’avaient jamais cherché à les connaître. Les moyens de communication intérieure étaient inexistants. Nul ne s’était préoccupé d’améliorer les conditions de la navigation en relevant l’hydrographie des côtes : tout était concentré sur Manille et pourtant, même son admirable port n’avait jamais été l’objet des travaux nécessaires et se trouvait totalement dépourvu d’outillage. Ignorant les véritables richesses de l’archipel, on s’était naturellement peu préoccupé d’en tirer parti : les forêts et les mines restaient inexploitées ; l’industrie était primitive ; l’agriculture demeurait dans l’entance. Quant aux populations, elles se trouvaient maintenues, autant que l’avaient permis leurs tendances naturelles, dans une saine ignorance du progrès : leur instruction était médiocre et leur éducation, purement religieuse. On voulait à tout prix qu’elles demeurent de simples outils entre les mains des blancs : cette prétention les avait à la fin exaspérées. Le commerce se chiffrait en moyenne par 100 millions par an vers la fin du xixe siècle, représenté principalement à l’exportation par l’abaca (chanvre de Manille), le sucre, le coprah, le tabac, à l’importation par le riz, la farine, le charbon, etc. Sur ce chiffre, la part de l’Espagne était presque nulle, inférieure à 4 millions de francs !

Tel est, brièvement exprimé, le bilan de la domination espagnole et voilà qui explique comment les Philippines en étaient arrivées à devenir pour l’Espagne une lourde charge et à lui procurer beaucoup plus de déboires que de profits.

L’œuvre entreprise par les États-Unis

Possesseurs des îles Philippines, les Américains ont dû consacrer leurs premiers efforts à les reconquérir sur les indigènes du parti séparatiste insurgé sous la direction du fameux chef Aguinaldo. Ce dernier, qui avait aidé les Américains à combattre les Espagnols, se tourna contre ses alliés dès qu’ils prirent la place des vaincus. Il réclamait pour son pays une république indépen-