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L’HELLÉNISATION DE ROME

prétentions sur les régions qu’il traversera. Nous pouvons donc lui apporter nos capitaux. En principe, l’accord est parfait.

Il serait parfait, du moins, si l’Allemagne consentait à nous dédommager de cet apport autrement qu’en monnaie de singe. Dans une entreprise de ce genre, les capitaux doivent être considérés en même temps comme placements de la fortune privée et comme agents de la fortune publique. Il leur faut à la fois des garanties financières et des garanties politiques. Nous devons ici désirer d’autant plus sérieusement les secondes que les premières sont fort problématiques. L’Allemagne nous les refuse. Elle prétend faire de notre argent l’instrument exclusif de l’expansion allemande. Elle se rend compte, d’ailleurs, de l’importance des privilèges que nous lui abandonnerions puisqu’elle veut les considérer comme une monnaie d’échange et les payer de sa bienveillance à propos des affaires marocaines, mais elle affecte d’ignorer que nous pouvons ici nous passer d’elle beaucoup plus facilement qu’elle ne peut se passer de nous en Turquie. Elle nous oifre un œuf contre un bœuf. Avouez qu’il n’en coûte guère de parler de conciliation quand on l’entend à cette manière.


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L’HELLÉNISATION DE ROME



C’est proclamer une vérité longtemps méconnue, mais devenue aujourd’hui presque banale que de mettre en relief la double conquête de Rome et de la Grèce l’une sur l’autre, la première matérielle, la seconde mentale. Les Romains soumirent les Grecs ; cela, on l’a toujours su ; c’est un fait pour ainsi dire tangible ; après quoi le monde latin s’imprégna d’hellénisme ; cela, nos pères l’avaient oublié ; c’est un fait plus subtil, encore que l’évidence s’en impose à toute critique un peu serrée. Du reste, les Anciens en avaient eux-mêmes instruit la postérité. Cicéron et Horace pour ne mentionner que les autorités les plus hautes s’expriment à cet égard de façon très nette. Il existe des liens étroits entre la Grèce, la République romaine, l’Empire romain et l’Empire byzantin. Ces liens, c’est l’hellénisme qui les constitue ; il y a là comme un vaste circuit embrassant près de vingt siècles de l’histoire humaine et l’on peut même se demander si le circuit est terminé, car