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CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE

breux qui passent à Bombay. Son but est plus élevé. Ses fondateurs et ses membres, de nationalités et de religions très diverses, asiatiques ou européens, parsis ou musulmans, indouites ou chrétiens, reconnaissent l’action bienfaisante que la France a exercée sur l’humanité, s’efforcent à favoriser l’enseignement de notre langue, à faire connaître notre littérature, à faire aimer la France. Pour cela, ils organisent des lectures, des conférences, des représentations théâtrales. Ainsi que cela vous a été dit, quand la commission chargée de la revision des programmes universitaires a conclu à la suppression de l’enseignement de la langue française dans l’Inde, c’est à l’action du cercle que revint l’honneur d’obtenir que l’adoption de cette mesure soit retardée. Personne en France ne s’est préoccupé de cette importante question ; il n’a pas été objecté qu’en considération de l’entente cordiale la mise à l’étude de cette mesure vexatoire était inopportune, le cercle, sous la direction active de son président et de son secrétaire général, a entrepris une vigoureuse campagne. Ces messieurs n’ont ménagé ni leur temps ni leur argent ; leurs efforts ont été couronnés d’un succès inespéré. Il est pourtant vrai, comme on vous l’a dit, que le consul, pour un motif futile, n’a voulu aucune relation avec le cercle. Chose plus grave : le ministère a cessé tout envoi de livres et de périodiques à son adresse. L’effet produit est déplorable.

Est-il admissible que pour une question de préséance d’aussi minime importance et qui n’avait préoccupé aucun de ses prédécesseurs, le consul actuel ait rompu avec ce cercle ami de la France ? Ne faut-il pas croire plutôt que le consul n’a su voir en la personne de son président que le représentant d’un ordre religieux chassé de France ? Que ne l’a-t-il avoué franchement ? Le Père Notti se serait volontiers effacé, j’en ai reçu l’assurance. Dictée par une considération de ce genre, l’attitude de notre consul a été sévèrement jugée à Bombay où les Anglais affectent précisément un extrême libéralisme à en matière religieuse. »

Cette communication d’un témoin parfaitement qualifié nous est précieuse. Nos lecteurs connaissent bien notre impartialité en matière religieuse. Ils ne suspecteront pas l’opinion que nous allons émettre. À l’exemple de nos plus grands hommes d’Etat libres-penseurs, nous réprouvons hautement l’exportation systématique de l’anticléricalisme. Nous ne devons pas transporter à l’étranger le terrain des luttes politiques ou confessionenlles dont les circonstances nous font parfois hélas ! une nécessité à l’intérieur de notre pays. Quels que soient les motifs de notre agitation intérieure, nous devons donner à l’extérieur l’impression d’une union parfaite, d’une commune intuition de l’intérêt supérieur de la France. D’où que vienne un concours utile au progrès de l’influence française, nous n’avons pas le droit de le repousser, nos agents ont le devoir de lui faire bon accueil. S’il est vrai que la seule qualité du président du Cercle français de Bombay a dicté l’attitude de notre consul à son égard, nous soutenons que ce consul a commis une faute grave et donné un fâcheux exemple. Nous aimerions beaucoup à revenir sur cette impression.