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dération américaine. La question d’une annexion éventuelle du Canada n’est d’ailleurs pas posée davantage aux États-Unis. Sans doute quelques politiciens américains se sont déclarés partisans des revendications de l’Irlande contre l’Angleterre, mais, ce faisant, ils n’avaient d’autre but que de recueillir l’appoint des voix irlandaises pour mieux assurer leur élection. En fait, au point de vue purement politique, le Canada et les États-Unis ne songent ni à unir leurs destinées ni à partir en guerre l’un contre l’autre.

Lorsqu’on soulève un coin du voile qui dérobe à nos yeux l’avenir du Canada, il faut se rendre compte que le pouvoir politique aux États-Unis s’est concentré dans le Sénat. Or, le Sénat comprend autant de membres des petits États que des États les plus importants ; dès lors on y discute principalement des questions d’intérêt particulier et il semble également impossible d’y concevoir et d’y poursuivre un grand dessein. D’autre part, n’y a-t-il pas lieu de supposer que l’ouverture du canal de Panama, en facilitant les relations entre le Mexique et les États-Unis, attireront ceux-ci vers le sud ? Enfin les agissements du Japon sur le Pacifique semblent aussi de nature à détourner du Canada les pensées du gouvernement américain.

Aussi bien, pour se rendre compte de ce que peut être un jour le Canada, ce n’est pas sa carte politique qu’il convient de considérer, mais sa géographie physique. Ce qui caractérise le Dominion, c’est l’existence de quatre régions territoriales très étendues et séparées les unes des autres par de vastes espaces ou des obstacles naturels considérables. Au contraire, ces quatre régions sont intimement rattachées au pays qui borde leur frontière méridionale. De la sorte les rapports sont très peu nombreux entre les habitants des quatre régions ; n’était le tarif prohibitif des États-Unis, à peine existerait-il entre eux de relations commerciales.

Au contraire, nous voyons la province d’Ontario demander son charbon à la Pensylvanie, tandis que la Nouvelle Écosse expédie le sien à la Nouvelle Angleterre. En fait, et sur une grande échelle, une fusion s’établit entre les habitants du Canada et les citoyens d’Amérique. On compte au sud de la frontière du Dominion 1.200.000 Canadiens ; dans le Massachussets seul se trouvent 150.000 Franco-Canadiens. Parallèlement, un contre courant américain monte dans la province du nord-ouest : les