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REVUE POUR LES FRANÇAIS

La nervosité des Français ne lui permit pas de leur faire comprendre ce qu’il attendait d’eux à cet égard et les avantages qu’ils en pourraient tirer. Non seulement à Berlin on n’a pas parlé du Schlesvig mais il est à croire qu’on n’a pas parlé de la Baltique. Un journal anglais connu pour ses exagérations anti-allemandes et son dédain de l’exactitude a dénoncé la conclusion secrète d’un traité qui eut, à la requête de l’empereur Guillaume, fermé l’accès des détroits aux navires du dehors. Il aurait fallu aussi le consentement de la Suède et celui de la Russie non moins intéressées que le Danemark et l’Allemagne en ce qui concerne la navigation dans la Baltique. Qui peut s’imaginer un seul instant que ces deux puissances eussent accepté de se lier les mains de pareille façon ? Du reste, en inclinant trop nettement du côté de l’Allemagne, le gouvernement danois n’irait pas seulement à l’encontre du sentiment national dont la fidélité envers les « frères séparés » demeure intacte, il se dresserait à lui-même de regrettables barrières en travers d’une route utile et honorable. Le rôle du Danemark actuellement est très clair : il doit, profitant des étroites relations de familles qui existent entre son souverain et les souverains régnant à Stockholm et à Christiana, s’employer à rétablir la vieille union Scandinave sur des bases nouvelles. Les trois royaumes ont de grands intérêts communs sans parler du sentiment de la race qui doit dominer leurs dissentiments actuels. Frédéric viii comprend et accepte une si haute mission. Il l’a prouvé par les premiers actes de son règne en abordant de front avec autant de prudence que de fermeté la tâche délicate de rétablir des rapports cordiaux entre la Suède et la Norvège. Puisse l’accomplissement lui en être facilité.

Choses d’Espagne.

Deux faits caractérisent actuellement la politique espagnole : au dehors la coopération intime avec la France dans les affaires marocaines ; au dedans, la lutte contre le cléricalisme. En présence de l’état de désordre qui s’est établi au Maroc et qui est la conséquence forcée de l’action allemande on pouvait craindre que la France et l’Espagne n’éprouvent quelque hésitation à intervenir et, à tout le moins, quelques divergences de vues dans la manière de le faire ; on pouvait craindre surtout que leur action ne