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LA FRANCE COLONIALE

Le Tonkin est, nous semble-t-il, la partie de l’Indo-Chine française à laquelle nous devons attacher le plus de prix et consacrer le plus d’efforts. Sa position géographique nous facilite la pénétration commerciale des provinces limitrophes de la Chine : par les voies naturelles du Tonkin, Yunnan-Sen est à 24 jours de la mer, par la Birmanie à 38 et par la Chine elle-même à 42 ; pour une balle de coton les frais de transport par voie française atteignaient ainsi 37 francs, tandis qu’ils dépassaient 62 francs par voie anglaise ! La différence entre ces chiffres donne une idée précise de notre privilège. Nous l’avons d’ailleurs perfectionné par la construction de chemins de fer de pénétration qui affirment définitivement notre prépondérance économique sur le Yunnan et le Kwang Si. Le Tonkin est un riche pays agricole. La superficie de ses rizières atteint dans les deltas du Fleuve Rouge et du Thai Bin environ 900.000 hectares : les mieux placées fournissent deux récoltes par an. Cependant son avenir est ici inférieur à celui de la Cochinchine : presque toutes ses terres disponibles sont, en effet, dès à présent utilisées et surpeuplées : ou y compte dans certaines provinces plus de 350 habitants au kilomètre carré. Après le riz, le coton, le maïs, le manioc, le jute, la ramie, le mûrier sont de première importance dans l’agriculture tonkinoise.

Les forêts du Haut-Tonkin abondent en bois de fer, santal, ébène, bois de rose et possèdent des réserves considérables en plantes et lianes à caoutchouc. Mais la caractéristique économique spéciale du Tonkin, ce sont ses mines, et surtout ses houillères. Étant donné la position excellente des gisements de Hongay situés sur la côte même et la facilité de l’extraction du minerai qui s’y abat à ciel ouvert, ses charbons se sont vite répandus en Extrême-Orient. Sans valoir nos charbons gras, ils sont très appréciés pour leur grande puissance calorique et reconnus supérieurs aux charbons japonais. On en a exporté pour 4 millions de francs en 1904, principalement sur Hongkong. D’autres gisements houilliers très importants existent à Yen Bai sur le Fleuve Rouge et dans l’île de Kebao. Leur capacité totale est évaluée à 12 milliards de tonnes.

Considérez l’ensemble des ressources naturelles que nous avons énumérées, ajoutez y une population nombreuse, intelligente, réputée pour fournir une excellente main d’œuvre, et vous concluerez avec nous que le Tonkin est par essence un pays