Page:Revue pour les français, T1, 1906.djvu/568

Cette page a été validée par deux contributeurs.
426
REVUE POUR LES FRANÇAIS

l’influence d’un missionnaire français, l’évêque Pigneau de Béhaine, qui l’entraîna à faire appel au concours effectif de la France. Par son intermédiaire fut conclu en 1787 le traité de Versailles : Louis xvi s’y engageait à fournir une petite armée, des canons, quelques bâtiments de guerre au souverain détrôné qui promettait en retour de nous céder la baie de Tourane et d’ouvrir ses États au commerce français. La France n’exécuta pas ses promesses, mais l’évêque ami de Nguyen Anh, lui ayant procuré les services d’un certain nombre d’officiers et d’ingénieurs français, le fit bientôt rentrer en possession de son empire. Nguyen Anh fonda sous le nom de Gialong une dynastie nouvelle. Toujours aidé par nos compatriotes, il conquit ensuite le Tonkin, réalisant ainsi l’unité annamite depuis longtemps rompue.

Les successeurs de Gialong abandonnèrent sa politique et manifestèrent contre les Européens une hostilité violente. À force de persécutions ils attirèrent l’intervention française. Les expéditions militaires s’y succédèrent depuis 1873, et aboutirent en 1884 au traité de Hué qui consacra notre protectorat sur l’Annam.

L’Annam proprement dit, limité par la Cochinchine, le Cambodge, le Laos, le Tonkin et la mer de Chine, forme une bande de terre étriquée dont la largeur atteint à peine 150 kilomètres. C’est un pays très montagneux, boisé, bien arrosé, suffisamment peuplé.

Ses cultures caractéristiques sont le thé, le coton et le mûrier. L’avenir du thé est immense : l’Indo-Chine en importe environ 1.300.000 kilos par an ; le coton trouve un débouché dans les filatures du Tonkin qui en font venir de l’Inde pour plusieurs millions chaque année ; quant à la soie, on sait que nos manufactures lyonnaises en achètent annuellement pour plus de 30 millions sur le marché de Canton. Ces simples chiffres indiquent suffisamment les « perspectives » économiques de l’Annam pour ses trois principaux produits auxquels s’ajoutent d’ailleurs beaucoup d’autres ressources.

Le Tonkin appartient à la France depuis le traité de Tien-Tsin qui termina en mai 1885 la guerre menée contre la Chine à la suite de ses protestations contre l’établissement du protectorat français sur l’Annam. Ces faits, inséparables du nom de Jules Ferry, nous sont contemporains et très connus.