L’ÉTHIOPIE D’AUJOURD’HUI
Depuis qu’il a mis en déroute l’armée italienne, en 1896, le négus Ménélik, roi des rois d’Éthiopie, bénéficie chez nous d’une popularité sans cesse croissante. Nos diplomates lui font la cour, nos journaux le couvrent de fleurs, tout le monde en parle — bien peu le connaissent. Nous avons le devoir de vous le présenter, en insistant sur l’importance du pays qu’il gouverne, et nous vous conseillons de lire les pages suivantes : vous y trouverez d’intéressants détails et des éléments d’appréciation très suggestifs.
Aucune image ne peut mieux exprimer l’aspect géographique de l’Abyssinie que cette définition d’Élisée Reclus : « C’est une citadelle de rochers ». Contrée magnifiquement pittoresque isolée au milieu des sables, composée de terrasses successives, aux flancs abrupts, aux pentes fortement accentuées, d’accès très difficile, et couronnée par un plateau immense dont l’altitude moyenne dépasse 2.000 mètres, elle est riche en aspects et en climats divers. Ses plus hauts sommets, le mont Abba et le mont Gouna, atteignent respectivement 4.660 et 4.230 mètres, et sont couverts de neiges éternelles. Un bras du Nil — le Nil bleu — y prend sa source, chemine entre des gorges d’une profondeur effrayante, s’y gonfle démesurément et en sort avec fougue pour se réunir au Nil blanc et courir avec lui vers la mer, pendant près de 6.000 kilomètres.
L’Éthiopie présente cette particularité d’offrir à la fois, sous une même latitude tropicale, le climat, la faune et la flore des régions sahariennes et des pays tempérés. En bas, c’est le désert inculte : le thermomètre n’y marque jamais moins de 20°, souvent plus de 40 ; en haut, ce sont les plaines fertiles, les collines boisées, les vallées fécondes : la température y dépasse rarement 20°, sans jamais y tomber au-dessous de 12. Printemps perpétuel. Les saisons n’y sont pas tranchées comme en Europe, l’année se divise simplement en deux phases : la saison sèche et la