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mand indépendant, ils abandonnaient pour cette ombre politique la proie économique dont ils tendent à s’emparer, leur échec final deviendrait plus que probable. On les engage à se cantonner dans les États du sud, on leur permet d’obliger au besoin par des lois le flot de l’émigration annuelle à se diriger vers eux, on évoque devant leurs yeux l’image d’un groupement de trente millions d’âmes auquel ils pourraient atteindre dès le milieu du xxe siècle (quand même ils ont mis 70 ans à être 500.000). Ce sont là des folies. Un tel groupement s’il existait vers 1950 devrait cesser d’être allemand ou bien toute la pesée de l’américanisme s’exercerait sur lui. La doctrine de Monroë n’est pas seulement l’expression d’une ambition tangible de la part des États-Unis : c’est avant tout, la constatation d’un fait. Si l’Amérique veut progresser il faut qu’elle soit autonome et libre. L’appui des États-Unis ne manquerait pas au Brésil le jour où un État européen prétendrait ériger une dépendance sur son territoire. Mais songez de plus à la redoutable voisine que serait, en ce temps-là, la République Argentine, au degré de richesse et de puissance auquel sera parvenu le continent tout entier. Vingt millions d’Européens ne représentaient pas alors ce qu’ils représenteraient aujourd’hui. Non ! en vérité, l’État germano-brésilien est une chimère après laquelle nos voisins ont le temps de se ronger tous leurs ongles.

La réforme du mariage.

Rien de comique comme la gravité avec laquelle un groupe de gens folâtres s’occupent chez nous de « réformer le mariage » en même temps que se discute dans nos cénacles féministes l’important problème du « Madame » ou du « Mademoiselle ». Il serait question de supprimer ce dernier vocable et d’appliquer l’autre à toutes les femmes. Cela se fait déjà pour les princesses. Eh bien ! cela se fera pour tout le monde. On dira Madame aux petites filles pour leur épargner la déconsidération qui s’attache à leur qualité virginale. Quant au mariage il deviendra un aimable édifice dans lequel, comme l’écrit spirituellement Madame Yvonne Sarcey, « l’on s’engouffrera parce que la façade plaît » et d’où l’on s’évadera « pour une cheminée qui fume ». « Il est à remarquer, observait dernièrement un des chroniqueurs du Petit Niçois en analysant ces biscornuités, que toutes les fois qu’on aborde dans la presse ou au théâtre les redoutables questions du mariage, du