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PAULHAN. — L’ABSTRACTION ET LES IDÉES ABSTRAITES
L’ABSTRACTION ET LES IDÉES ABSTRAITES[1]

LES FORMES LES PLUS ÉLEVÉES DE L’ABSTRACTION

III

C’est un fait reconnu maintenant et généralement admis que toute idée, toute représentation, est accompagnée d’une tendance motrice (ce qui ne signifie nullement qu’elle s’accompagne d’une représentation de mouvement) ; si je me représente vivement un acte, j’ai une certaine tendance à commettre cet acte ; si je me représente un mot, j’ai une certaine tendance à prononcer ce mot. Une idée implique par conséquent toute une synthèse psycho-physiologique d’éléments divers.

Quels sont les rapports de l’idée abstraite et générale (toute idée est générale et abstraite) des images et des autres phénomènes psychiques, c’est ce que nous aurons à rechercher ici. Nous tâcherons d’abord en analysant les faits de déterminer ce qu’est l’idée et en quoi elle se distingue des autres phénomènes qui l’accompagnent et qui la masquent ; nous étudierons ensuite l’idée en elle-même pour tâcher de bien déterminer sa nature ; nous pourrons voir ensuite comment elle se lie avec les autres phénomènes et avoir ainsi une synthèse générale, théorique des diverses formes de l’abstraction que nous trouvons dans l’étude de la psychologie.

Les images se présentent en moi comme morcelées et sans suite, je ne puis facilement fixer mon attention sur un système d’images successives. Je parle bien entendu de la vie normale, car il n’arrive de suivre en rêve des séries cohérentes d’images, encore ceci est-il assez rare, mes rêves sont généralement peu colorés, peu concrets. Quand je suis une série de propositions concrètes, les images ne se

  1. Voir le numéro précédent de la Revue.