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A. BINET.sur les mouvements volontaires

anesthésique. Bien que le témoignage du sujet porte ici sur un état subjectif et par conséquent difficile à contrôler, nous croyons cependant devoir l’admettre sans hésitation, car tous les sujets que nous avons observés sont unanimes à déclarer que la conservation d’une pose par le membre anesthésique ne les fatigue nullement. Il existe en outre des moyens objectifs de constater l’effort et la fatigue ; il suffit pour cela de prendre le tracé des mouvements respiratoires pendant l’expérience, et le tracé des tremblements du membre. La méthode graphique peut servir ici de contrôle. Les résultats que fournit cette méthode sont assez variables. Il est des sujets chez lesquels le rythme respiratoire reste calme et régulier d’un bout à l’autre de l’expérience[1]. Chez d’autres, au contraire, par exemple chez P. S., les mouvements de la respiration peuvent présenter au bout de quelque temps un trouble notable, une précipitation qui est évidemment sous l’influence de la fatigue, mais cette fatigue, le sujet ne la sent pas. Si d’ailleurs on compare chez P. S. les deux tracés pneumographiques pris selon que le sujet maintient étendu le bras sensible ou le bras anesthésique, on reconnaît une certaine différence dans les deux cas ; quand P. S. tient étendu son bras sensible, les irrégularités de sa respiration sont beaucoup plus grandes. La comparaison des deux figures ci-après le montre nettement.

Il est, ce nous semble, bien curieux de constater l’espèce de démenti que donne la méthode graphique au sujet qui prétend n’éprouver aucune fatigue ; certainement il y a eu fatigue, le tracé en fait foi, mais fatigue inconsciente et atténuée.

Il arrive parfois que pendant la conservation d’une pose par le membre anesthésique la courbe respiratoire se rapproche du type de la respiration cataleptique ; les mouvements deviennent plus superficiels et plus rares. Mais ce caractère n’est pas constant chez un même sujet.

En ce qui concerne le tremblement du membre étendu, nous pouvons observer les mêmes variétés d’un sujet à l’autre que pour le rythme respiratoire. Chez plusieurs hystériques, le membre anesthésique étendu ne tremble pas ; il présente seulement des oscillations lentes. Chez d’autres, au contraire, il est animé d’un tremblement qui est moins accusé que celui du membre sensible. Parfois, comme chez Chesn…, ce tremblement s’exagère quand le bras revient au repos.

En résumé, deux cas peuvent se présenter ; tantôt, pendant la conservation de la pose par un membre anesthésique, le sujet

  1. M. Séglas vient de publier récemment un cas de ce genre.