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ANALYSES.d. cochin. L’évolution et la vie.

poussée encore plus loin. Chaque catégorie de souvenir peut être décomposée elle-même en de nouveaux éléments. J’ai dit ailleurs que chez moi la parole intérieure auditive est généralement sans timbre, le timbre est donc un élément de l’image auditive et l’image auditive dont le timbre paraît nul est évidemment plus abstraite que l’autre. Si d’ailleurs on prend la série des images auditives en partant de l’image abstraite pour aboutir à l’image hallucinatoire, on remarque que de nouveaux caractères viennent, à mesure qu’on parcourt la série, s’ajouter à ceux qui se trouvent dans les images abstraites. Ce que l’on sait de la complexité des sensations peut s’appliquer aussi aux images et une image auditive est une synthèse d’éléments multiples. Il en est de même pour les images visuelles et probablement aussi pour les images motrices. Une recherche sur la composition des images ne serait pas d’ailleurs sans intérêt pour la pathologie et la physiologie. On y trouverait peut-être des éclaircissements sur la nature, le fonctionnement et les troubles des centres du langage et de leurs relations mutuelles.

Peut-être serait-on amené, par exemple, à multiplier le nombre des troubles venant d’un défaut de conductibilité, si chaque centre apparaissait lui-même comme une organisation de centres secondaires. Mais je n’insiste pas sur ces hypothèses, et je termine en recommandant le livre de M. Ballet aux amis de la psychologie qui ne l’auraient pas encore lu.

Fr. Paulhan.

Denys Cochin. L’Évolution et la Vie. Paris. G. Masson, 1886, 1 vol. , in-18, 306 pages.

Le travail de M. Cochin est une critique de la théorie évolutionniste, dirigée contre M. H. Spencer, le plus illustre représentant de cette doctrine. M. Cochin n’a pas fait une critique très détaillée du système, il a surtout concentré ses efforts sur un seul point, celui qu’il était le mieux préparé à examiner, je veux parler de la difficulté qu’il y a pour la théorie évolutionniste à faire sortir la matière vivante de la matière inanimée. L’auteur a clairement exposé les faits et adroitement critiqué la théorie qu’il attaque. Pour lui la science positive s’oppose absolument à ce qu’on fasse sortir la vie de ce qui ne vit pas ; il est parfaitement au courant des travaux modernes qui intéressent à la fois la chimie et la biologie et qui peuvent éclairer jusqu’à un certain point les rapports de ces deux sciences. Peut-être abuse-t-il parfois de son érudition, par exemple, lorsqu’il écrit trente pages pour donner un compte rendu intéressant et bien fait, mais qui n’apprend rien de nouveau des travaux de M. Pasteur sur les ferments, le virus et la vaccination. Ce qu’il faut louer dans le travail de M. Cochin, c’est, outre le style clair, net, agréable et l’abondance des informations, la précision de la