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ANALYSES.f. kœgel. Lotzes Æsthetik.

Le premier pas phylogénétique de la conscience dans le monde s’est fait sous forme de sensation ; or la forme de la sensation est le nombre. À chaque excitation externe correspond dans certaines limites une sensation ; à chaque sensations subjective un objet empirique.

a). Il existe une identité numérique entre nos perceptions et le monde des phénomènes ; le monde entier repose sur la causalité ; tout phénomène est conditionné par un autre. Si par exemple je dis : « la pierre meut le bois », j’exprime un rapport causal entre la pierre et le bois. Comment suis-je arrivé à cette proposition ? Évidemment par analogie, en remplaçant le sujet primitif moi par « la pierre ». Je sais par expérience que si je pousse du doigt contre le bois, celui-ci balancera ; j’en conclus que la même chose arrivera si je le touche avec d’autres objets. Si cette conclusion avait été inexacte, l’état des choses m’en aurait convaincu, de plus il m’aurait été impossible de tirer une conclusion, car le langage, comme expression des relations réglées, serait impossible.

b). À la synthèse transcendantale de la pensée pure correspond une synthèse transcendantale des phénomènes. D’où les deux propositions suivantes :

I. L’esprit dans son ensemble est un produit développé en harmonie avec le reste du monde ;

II. La théorie de la descendance nous donne seulement le « comment » des phénomènes et non le « par quoi » ou le « de quoi » ; elle est une science descriptive, elle décrit le « quand » et l’occasion par laquelle les phénomènes se manifestent. Mais dire pourquoi l’esprit existe, de quoi il se compose, quelle est son essence, ce sont là autant de questions qu’elle ne saurait résoudre. Elle n’est pas en état de renverser le criticisme de Kant.

Em. Namur.

Dr Fritz Kœgel.Lotzes Æsthetik, in-8o, Leipzig.

L’auteur a eu dessein de donner un exposé systématique des vues de Lotze sur l’esthétique. Un pareil exposé ne se trouve pas dans les ouvrages mêmes de Lotze, et n’avait pas encore été fait par d’autres.

Les sources principales sont les suivantes : 1o Histoire de l’esthétique en Allemagne, 1868 ; — 2o Sur le concept du beau, 1845 ; — 3o Des conditions de la beauté dans les arts, 1847 ; — 4o Le Microcosme, notamment un chapitre sur l’art et le beau.

Si l’esthétique de Lotze n’est pas systématiquement exposée, elle est sans aucun doute systématiquement conçue. Lotze n’appartient proprement ni à l’école idéaliste, ni à l’école formaliste : il appartient à toutes deux. À l’idéalisme il reproche d’avoir négligé l’étude des caractères formels en vertu desquels les objets beaux nous paraissent beaux ; au formalisme, d’avoir méconnu les raisons dernières de la beauté : ses attaques contre Herbart sont encore plus rudes que celles qu’il dirige contre Hegel. Pour faire comprendre la position prise par Lotze, on peut dire que son esthétique repose sur les principes métaphysiques de