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G. LE BON.applications de la psychologie

IV

Le court aperçu qui précède a suffi à montrer combien sont profondes les différences qui séparent les races de l’Inde. L’immense péninsule ne peut être considérée que comme une vaste mosaïque composée de peuples les plus divers, depuis le sauvage le plus primitif jusqu’à l’homme civilisé, en passant par toutes les phases intermédiaires. Ce nom générique d’Hindous comprend une collection d’hommes où l’on rencontre toutes les couleurs de la peau, depuis le nègre jusqu’au blanc, ainsi que tous les types possibles de physionomie entre la suprême beauté et l’extrême laideur.

Les caractères moraux et intellectuels de ces races ne sont pas moins variés que leurs caractères physiques. Il y a un abîme entre le Rajpout, renommé pour son incomparable bravoure, et le Bengali, connu par son ignominieuse lâcheté ; entre les montagnards du Rajmahal qui ne mentent jamais et certains Hindous qui mentent toujours.

Il doit donc sembler légitime de conclure, au premier abord, qu’il n’existe aucun caractère commun entre des races si dissemblables, mais nous verrons bientôt que cette conclusion serait erronée, et que la communauté des milieux physiques et intellectuels a produit certains caractères généraux. Ce sont ces caractères communs qui permettent de réunir certaines races en une même famille, de même que le naturaliste réunit dans une même classe des êtres aussi dissemblables que l’éléphant et la souris.

Laissant donc de côté les différences de détail, nous allons rechercher maintenant les caractères psychologiques communs que possèdent certaines populations de l’Inde. Nous verrons alors que ces caractères permettent de donner à l’expression d’Hindou un sens déterminé. Il ne faut pas croire cependant que cette expression puisse avoir aujourd’hui la valeur précise et arrêtée qu’ont, par exemple, les noms de Français, Anglais ou Allemand. La fusion entre les éléments divers n’est pas assez complète. Pour rendre clairement notre pensée, nous rappellerons ce qu’était la France sous les Carlovingiens et quelle aurait été alors la valeur du nom de Français appliqué en général à ces mélanges de Goths, de Francs, de Gallo-Romains, qui commençaient à peine à se fusionner et à posséder par conséquent quelques grands traits généraux.

Avant de décrire les caractères communs à la majorité de la popu-