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des solutions du problème universel qui ne peuvent être qu’incomplètes. Prendre les limites d’un système pour les colonnes d’Hercule de la vérité est une illusion qui n’est plus pardonnable. Ce que nous disons là a l’air d’une vérité banale ; en fait c’est une vérité qu’on méconnaît constamment. L’empirisme prétend ramener à l’association des idées toutes les opérations de l’intelligence, ou plutôt tout l’esprit, parce qu’il réussit à montrer comment on peut trouver dans l’association le principe de certains jugements, de certains raisonnements ; le matérialisme, parce qu’il a pu rattacher à l’organisme, avec quelque apparence de raison, les fonctions sensitives de l’âme, veut aussitôt, et [sans désemparer, y rattacher ses fonctions supérieures ; et ainsi du reste. Généraliser trop et trop vite, voilà le grand écueil pour le philosophe ; mais, dans tous les cas, on peut tenir pour faux a priori tous les systèmes, toutes les doctrines qui, méconnaissant le caractère relatif de notre entendement, prétendent ramener à ses lois et réduire à ses données les principes ultimes des choses.

Charles Dunan.