Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXII, 1886.djvu/373

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
369
SOREL.sur les applications de la psycho-physique

II

Les discussions sur la psycho-physique roulent généralement sur les lois de Weber et de Fechner. On sait que d’après Weber les erreurs relatives maxima commises dans l’appréciation d’égalité de deux excitations sont constantes : c’est la généralisation de la règle du comma en musique : cette formule a été beaucoup attaquée et, de fait, elle ne peut être absolument générale en raison de l’existence des limites de nos perceptions ; mais, dans les sciences physiques, on doit bien moins chercher à trouver des lois rigoureusement exactes que des lois relativement simples, suffisamment approchées dans les limites des applications usuelles. La loi de Mariotte est un exemple remarquable de cette méthode : personne ne doute de l’inexactitude de cette formule, mais on n’en continue pas moins à en faire constamment usage ; on l’applique journellement à la détente dans les machines à vapeur, bien qu’elle soit faite pour les gaz éloignés de leur point de saturation et que durant la détente la vapeur soit toujours en contact avec du liquide. Il existe bien peu de lois en physique qui puissent être considérées comme rigoureusement exactes alors même que l’on possède des tableaux ou des formules empiriques représentant très bien les observations faites avec précision, les nécessités de la pratique obligent à faire usage de relations approchées et simples, seules capables d’entrer dans les calculs et de servir à la solution des problèmes journaliers.

Pour la lumière et le son, la loi de Weber paraît se vérifier convenablement : les autres excitations sont beaucoup plus difficiles à étudier, et les expériences ont été d’autant moins nombreuses que les besoins de la pratique étaient moins marqués. Dans cette loi on fait entrer des éléments fort complexes et il y a fort à parier que la formule exacte devrait être extrêmement compliquée ; elle serait probablement inutile en raison même de sa complication. Le plus sage est donc de se borner à perfectionner la loi de Weber et de déterminer les limites de ses applications légitimes. M. Charpentier a communiqué à l’Académie des sciences en 1883 des expériences faites dans des limites fort étendues, ayant pour objet de donner pour la vision une formule plus exacte que celle de Weber ; elle pourrait, d’après lui, être appliquée aux lumières faibles.

Quand on discute la loi de Weber, il faut observer qu’elle ne fixe que la limite de l’erreur commise dans l’appréciation ; dans cette