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faut renouveler, comme on renouvelle l’eau qui dort par un courant d’eau vive. Rien n’est plus pernicieux que l’air croupi dans la chambre d’un malade. L’air renouvelé, tempéré par la fraîcheur de l’eau, imprégné de senteurs salutaires, nourrit, vivifie, rajeunit et alimente le cerveau.

Après avoir parlé des effets du soleil et du serein, et donné à ce sujet d’utiles préceptes d’hygiène, l’auteur passe en revue d’autres causes moins importantes de la santé et de la maladie, en tenant toujours compte des rapports de l’homme avec le monde extérieur, et il revient ensuite à l’étiologie morale. Le dégoût produit l’ennui, qu’il faut absolument repousser, en variant les occupations et les exercices, car c’est la variété qui plaît. Le travail qui est accompagné de dégoût ne produit que de la fatigue ; c’est une faute que de s’obstiner à poursuivre une tâche ingrate. Il y a là d’excellents avis pour les hommes d’études.

L’imagination est comme un moule vide qui donne la forme à tout ce qu’on y jette. Rien ne ressemble davantage à la réalité, car elle en tient lieu, et les images que reflète ce miroir agissent en raison de sa puissance. C’est par elle surtout que les passions agissent efficacement. La peur imaginaire peut donner la mort ; l’auteur en cite des exemples, et remarque à propos, que les effets de l’imagination ne sont pas moindres durant le sommeil que pendant la veille, ora sea en vigilia, ora sea en el sueño, obra lo mismo que la verdad. L’imagination opère chez les animaux, puisqu’ils rêvent, et chez l’homme, elle tient souvent lieu de bonheur ; beaucoup de gens ne sont heureux qu’en imagination, et à défaut de la réalité, se contentent de son image.

L’auteur lui-même a mis sans doute un peu trop d’imagination dans le chapitre suivant où il traite de l’action du soleil comme agent de vie ; mais il fait d’excellentes remarques sur la migration des oiseaux, et développe une comparaison qui lui est chère. À ses yeux, l’homme est un arbre renversé, dont les racines sont en haut (le cerveau et la moelle) et les rameaux en bas, ce sont les membres. C’est du cerveau que vient toute vie, c’est le cerveau qui est la source de la vitalité. L’estomac ne vient qu’en second ordre.

Il y a aussi beaucoup d’imagination dans le chapitre consacré à l’influence de la lune, et l’autorité d’Avicenne, renforçant quelques citations de Pline, ne peut donner consistance et crédit à de pures hypothèses astrologiques. Si la lune influe sur les marées, sa croissance et sa décroissance ne semblent pas influer sensiblement sur les phénomènes de la vie organique et animale ; et il y a longtemps que physiologistes et médecins ont renoncé à ces chimères des