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LA SENSIBILITÉ ET LE MOUVEMENT

(Fin[1].)

I.

La première source sensible du mouvement est évidemment le besoin. Nous disons : la première source sensible ; car il est avéré pour nous qu’il y a des mouvements élémentaires et simples précédant la sensibilité. Mais quand la sensibilité nous met, pour ainsi dire, en demeure d’agir pour fuir une douleur et en écarter la cause, ou pour prolonger et accroître un plaisir déjà goûté, elle ne le fait qu’en réalisant en nous cet état bien connu de tous, quoique difficile à définir, qu’on nomme le besoin. Il y a sans doute un certain nombre de mouvements que nous accomplissons au hasard ou par le fait d’une impulsion étrangère n’ayant produit en nous aucun état général, aucun effet durable et persistant. Il faudrait de la bonne volonté, par exemple, pour rattacher à un besoin les mouvements d’accommodation accomplis en présence d’un obstacle ou d’un danger subit, les mouvements d’imitation contagieuse ou bien encore ceux qu’exécute un enfant qu’on mène à la main. Il y a d’autre part des mouvements intimes et silencieux que la vie accomplit généralement sans nous, et qui ne font naître le besoin proprement dit que lorsqu’ils sont arrêtés par une gêne exceptionnelle : c’est entre ces mouvements constants et ces mouvements tout à fait accidentels et fortuits que s’organisent les mouvements dont nous sentons le besoin.

Cherchons maintenant une définition plus précise. Littré, dans son Dictionnaire, nous donne la suivante : « manque de, avec désir ou nécessité d’avoir ». Cette définition embrasse toutes les acceptions du mot, même celles qui sont métaphoriques, comme lorsqu’on dit que la terre a besoin d’eau ou que le raisin a besoin de soleil. Notre organisme a certainement de ces besoins-là, que la physiologie, aidée de la physique et de la chimie, nous explique nous les tenons ici pour connus. Pour avoir le fait qui nous préoccupe avec ses conditions, mais aussi avec tout son développement psychologique, il

  1. Voir le numéro précédent de la Revue.