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tème. En 1640, il écrivit en anglais un petit traité pour défendre le pouvoir royal contre le Parlement. L’ouvrage ne fut pas imprimé, mais il en circula des copies ; et Hobbes crut que sa vie eût été en danger si le Parlement n’avait été dissous. Il est à peu près certain que cet ouvrage était composé de deux parties qui formèrent en 1650 les deux volumes intitulés « Human Nature » et « De Corpore Politico. »

Dès son arrivée à Paris, où il se réfugia, Hobbes fut invité par Mersenne à lire les Méditations de Descartes, encore inédites, et à en donner son avis. Il se préoccupa moins de comprendre la pensée de l’auteur que de proposer, avec une grande assurance, ses vues sur les mêmes sujets. Descartes répliqua vivement et brièvement ; il déclara qu’il n’avait pas trouvé une inférence correcte dans toutes ces objections. Hobbes fit en outre à la Dioptrique quelques objections que Descartes ne trouva pas meilleures, bien que le P. Mersenne ne l’eût pas averti qu’elles vinssent du même auteur.

Mais les nouvelles qu’il recevait d’Angleterre n’étaient pas de nature à le rassurer et à lui permettre de travailler à l’exposition de ses théories sur le Corps, qui devaient servir de fondement à son système. Il fit paraître en 1642 le de Cive : sa politique ne paraît, pas plus que dans l’ouvrage précédent, avoir été dérivée des principes fondamentaux de sa philosophie ; elle s’explique principalement par les dispositions personnelles de Hobbes, qui était timoré, égoïste, et n’avait pas la moindre sympathie pour les aspirations de son temps. Le livre excita l’attention : Descartes déclara que l’auteur était beaucoup plus habile en morale qu’en métaphysique et en physique.

Hobbes revint alors à ses recherches scientifiques et s’occupa spécialement d’optique. En 1644, il inséra, dans la Préface aux « Ballistica » de Mersenne, une exposition condensée qui reproduisait les points principaux de la doctrine scientifique développée en 1640 ; il donna de même dans un autre ouvrage de Mersenne un court Tractatus Opticus. Il fut choisi en 1645, avec Descartes, Roberval et Cavalieri, pour juger la discussion de Pell et de Longomontanus sur la quadrature du cercle. Il avait sans doute commencé à composer le De Corpore, quand le marquis de Newcastle et quelques autres fugitifs vinrent, après la défaite de l’armée royale à Naseby, chercher un refuge à Paris. Il se trouva de nouveau rejeté dans le tourbillon politique. Il écrivit en anglais un ouvrage qui pût être lu de tous ; il y montrait la fin des troubles civils dans la constitution d’un pouvoir séculier, présidant à toute la vie humaine. Dès 1647, il publia une seconde édition du de Cive, augmentée de notes qui répondaient aux objections, et d’une préface où était indiquée la relation des idées qu’il y défendait avec l’ensemble de ses doctrines philosophiques. Il donna quelque temps des leçons de mathématiques au jeune prince de Galles. Il fut sur le point de mourir et refusa d’entrer en discussion avec le P. Mersenne, qui essayait de le convertir au catholicisme : « J’ai examiné longuement toutes ces choses, dit-il, et je n’ai pas maintenant l’esprit à de pareilles discussions. Vous