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FONSEGRIVE. — la logique de lotze

sant à la raison inverse de l’extension et de la compréhension des concepts, M. Lotze dit que cette loi lui paraît fausse là où sa vérité serait importante, et de peu d’importance là où elle est vraie. Puis vient la distinction de la différence spécifique, du propre et de l’accident.

Après avoir ainsi achevé la théorie des universaux, M. Lotze se demande quelle est la forme que prendrait le système entier de nos concepts si nous le supposions complet, et il répond que cette forme serait semblable à celle d’une chaîne de montagnes assise sur une base très large et terminée par plusieurs pics escarpés. Le monde serait ainsi formé d’idées éternelles et immobiles étagées les unes au-dessus des autres. Mais le devenir que constate l’expérience ne nous permet pas de nous représenter ainsi la réalité. Nous voyons se produire des changements, de nouveaux attributs apparaître dans un concept sans que le fonds même de ce concept ait changé, nous nous demandons alors quelle est la raison de cette variation. La forme que nous donnons à notre réponse est le jugement où le concept est posé comme sujet, la variation comme prédicat, et où la relation constatée entre les deux s’exprime par la copule.

II

Cette conception de la fonction du jugement domine toute la théorie de M. Lotze. Ce qui donne naissance au jugement est une variation qui s’impose à notre pensée ; aussi la relation exprimée par le jugement n’a-t-elle point lieu entre des idées, mais entre la matière de nos idées. Dans ce jugement : l’or est jaune, le sujet est l’or et non l’idée or, de même le prédicat est jaune et non l’idée jaune. La copule logique ne peut se placer qu’entre des objets. Les idées sont psychologiquement enveloppées les unes dans les autres, idéalement connexes, mais n’ont point de relations discursives et dès lors logiques. La partie essentielle du jugement est donc la copule ; dès lors les formes essentielles du jugement découleront des sens différents que nous donnerons à la copule, c’est-à-dire des différences que nous apercevrons dans les relations entre le sujet et le prédicat, différences que nous exprimons plus ou moins bien par les formes grammaticales de la proposition.

M. Lotze critique ici les catégories du jugement devenues classiques depuis Kant, et montre que ni la quantité, ni la qualité, ni même la modalité des jugements, telle du moins qu’elle est ordinairement comprise, n’ont une valeur logique. Le principe sur lequel