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sation renouvelées occupent les mêmes régions que l’idée et la sensation primitive, de sorte que le réveil de l’idée fait presque toujours renaître la sensation, mais atténuée et affaiblie.

3o Certains états cérébraux produisent une telle suractivité des centres sensoriels que cette activité devient périphérique et se traduit en illusions et hallucinations.

4o L’influence de l’intelligence peut, en détournant les courants nerveux, produire l’anesthésie aussi bien que l’hyperesthésie.

5o Outre les illusions, les hallucinations, les anesthésies, les hyperesthésies, l’intelligence crée dans le corps, par la continuité des idées qui l’occupent, d’importantes modifications organiques et de nouvelles idiosyncrasies.

6o Les mouvements musculaires qui expriment les états d’esprit sont figuratifs : les mêmes expressions désignent ces mouvements et les causes psychiques, et les mots sont alors pris tantôt dans leur sens littéral tantôt dans leur sens métaphorique. Les gestes s’expliquent par cette loi que l’énergie cérébrale se répand des centres corticaux de l’idée sur les centres inférieurs qui s’y prêtent le mieux, c’est-à-dire sur ceux qui ont été déjà précédemment portés à agir de même. C’est le principe de la moindre action ou de la moindre résistance appliqué aux phénomènes d’expression.

7o Localisation des émotions : quelques glandes sont sous l’influence spéciale de certaines émotions, le chagrin agit sur les glandes lacrymales, la tendresse maternelle sur les glandes mammaires, la fureur sur les glandes salivaires. Nulle émotion n’agit exclusivement sur un organe en particulier : cela résulte des sympathies qui unissent entre elles les différentes parties du corps. Une même émotion peut donc produire diverses maladies, mais, les circonstances restant les mêmes, on peut dire qu’elle produira toujours la même maladie. Conséquemment encore, la même émotion n’aura pas sur toutes les personnes la même influence : cela dépend du tempérament et du caractère. Certaines émotions cependant agissent chez tous les hommes sur les mêmes muscles, et cette loi est, pour ainsi dire, stéréotypée par l’hérédité. Les émotions vives (l’étonnement, par exemple) agissent spécialement sur les mouvements ; les émotions complexes (par exemple, les sentiments tendres) agissent plus particulièrement sur les glandes, comme Al. Bain l’a remarqué. La honte stimule la circulation cutanée et principalement des joues : rougeur des joues et des oreilles, honte et pudeur ; rougeur des yeux, colère ; rougeur du front, amour ; c’est une observation qui se retrouve chez les plus anciens physionomistes. Les émotions pénibles, déprimantes, agissent particulièrement sur les viscères abdominaux. Toutefois la règle n’est