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soit celui de l’historien, ou du savant, ou du philosophe :’on n’en voit alors qu’un côté, que l’on prend à tort pour le tout. À l’objet à connaître doit être proportionnée l’intelligence qui connaît : c’était un des axiomes de la philosophie grecque. Cette proportion entre l’objet et l’écrivain se rencontre dans l’œuvre de M. Berthelot : là est le secret de sa haute valeur.

Émile Boutroux.

Gabriel Compayré. Cours de pédagogie théorique et pratique. — Paris, Paul Delaplane, 467 p., in-12.

Le cours a été professé aux écoles normales de Fontenay-aux-Roses et de Saint-Cloud. Il est divisé en vingt-quatre leçons, douze relatives à la pédagogie théorique, et douze, à la pédagogie pratique. En celles-là, l’étude du sujet de l’éducation, c’est-à-dire l’enfant avec ses facultés ; en celles-ci, l’étude de l’objet de l’éducation, à savoir : les méthodes de l’enseignement, les règles de la discipline ; les premières traitent de l’éducation en général, de l’éducation physique, de l’éducation intellectuelle, de la culture de la sensibilité, de l’éducation morale, enfin, de l’éducation esthétique et de l’éducation religieuse ; et, dans les autres, il est parlé des méthodes en général, de l’enseignement de la lecture, de l’écriture, des leçons de choses, de l’enseignement de l’histoire, de la géographie et des sciences, de l’enseignement de la morale et de l’enseignement civique, puis du dessin, de la musique, de la gymnastique et des autres exercices, puis des récompenses, des punitions et de la discipline en général. Cette division du cours en deux parties semble heureuse.

Tout au commencement de sa première leçon, M. Compayré distingue entre la pédagogie et l’éducation. « La pédagogie, dit-il, est la théorie de l’éducation, et l’éducation, la pratique de la pédagogie. » La distinction se laisse entendre ; est-elle néanmoins si importante qu’il faille comme exprimer le regret que ni M. Marion, à la Sorbonne, ni M. Egger, à Nancy, ni M. Dauriac, à Montpellier, ni M. Thamin, à Lyon, n’aient osé intituler leurs cours : cours de pédagogie ? qu’il faille louer M. Espinas, qui professe à Bordeaux, d’avoir eu l’audace, lui, tout seul, de ne pas « reculer » devant cette appellation ? Pour lui, il se serait montré également audacieux, et il faudrait l’en louer également ? L’emploi d’un mot, juste ou non, d’ailleurs, peut, nous le savons, être quelquefois de conséquence ; mais, en l’état, que peut faire qu’on dise : éducation générale, science de l’éducation, ou pédagogie ? Ce à quoi l’on doit applaudir, ce n’est pas au choix de telle expression, au lieu de telle autre, pour désigner les cours récemment institués, c’est à cette sorte de révolution : l’institution de ces cours mêmes dans les écoles normales, dans les facultés.