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ANALYSES.berthelot. Les origines de l’alchimie.

lités lités occultes ; et les temps modernes qui, joignant au rationalisme des Grecs la connaissance des méthodes Scientifiques, démontrent, là où les Grecs n’avaient fait que deviner. L’alchimie, née au moyen âge, en partage entièrement les caractères, C’est une théorie, mais toute mystique et imaginaire, dans laquelle la production des phénomènes est rapportée à des agents surnaturels. Ainsi juge Hœfer. Aussi a-t-il beau exposer consciencieusement toutes les doctrines des philosophes grecs qui ont quelque rapport à la chimie, il n’en fait aucun usage quand il s’agit d’expliquer la formation des doctrines alchimiques. Ces doctrines, à ses yeux, ne sont autre chose que l’ancien art sacré des Égyptiens, interprété suivant les idées fantastiques du moyen âge.

Empirisme et superstition, voilà, jusqu’à nos jours, tout ce que l’on avait vu dans l’alchimie. M. Berthelot, tout en maintenant ces caractères qu’il détermine d’ailleurs avec plus de précision, trouve que l’alchimie a été en même temps tout autre chose, savoir une philosophie, et que, mélange confus d’empirisme, de mysticisme et de rationalisme, en même temps qu’elle plonge dans le passé, elle tend la main à la science moderne.

Ce n’est pas a priori et d’après des vues générales sur la marche de l’esprit humain que M. Berthelot assigne une telle portée à l’alchimie. Il a entrepris d’en rechercher les origines par curiosité de savant et d’érudit, sans idée préconçue ; et son premier soin a été de rassembler aussi complètement que possible tous les documents relatifs à son objet. Les travaux auxquels M. Berthelot s’est livré à cet égard doivent être mentionnés avec quelque détail. Non content de recueillir tous les renseignements que pouvaient fournir les ouvrages modernes, tels que les histoires de la chimie de H. Kopp et de Hœfer, et en particulier le mémoire de Lepsius relatif aux métaux dans les inscriptions égyptiennes, M. Berthelot est remonté aux sources, et en a fait une étude approfondie, dont son ouvrage nous expose les détails et les résultats.

Les sources en question sont, outre les témoignages historiques, les monuments alchimiques, papyrus et manuscrits, M. Berthelot n’a omis aucun des textes et monuments qu’il fût possible de se procurer, et ainsi son livre est composé de première main, d’après des documents en grande partie inédits.

Les papyrus grecs relatifs à l’alchimie que nous a légués l’ancienne Égypte, et qui sont conservés dans les musées de Leyde, de Berlin et du Louvre, constituent les documents originaux et les monuments authentiques. Ils datent du iiie ou du ive siècle après notre ère. M. Berthelot s’est livré notamment à une étude minutieuse des papyrus de Leyde, trouvés dans les tombeaux de Thèbes. Ces papyrus, peu étudiés jusqu’ici, traitent de magie, d’astrologie, d’alchimie, des alliages métalliques, de la teinture en pourpre et des vertus des plantes. M. Berthelot reproduit plusieurs des textes qu’ils contiennent,

Les ouvrages manuscrits des bibliothèques, en grande partie iné-