Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXI, 1886.djvu/508

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
504
revue philosophique

lui-même des conclusions excessives que lui ont dictées un enthousiasme juvénile et la satisfaction d’offrir pour la première fois au public français avec un apparatus complet l’œuvre si intéressante découverte par Mgr Bryennios. Il renoncera alors à préférer la Didachè au Nouveau Testament et il se contentera de la placer à côté de plusieurs des écrits qui composent celui-ci comme un des textes les plus importants qui puissent nous renseigner sur les caractères et l’organisation de l’ancienne Église chrétienne. Quelle que soit la vue à laquelle la critique doive s’arrêter définitivement en ce qui touche l’origine et la date de composition de l’Enseignement des douze apôtres, fin du premier siècle — ce qui serait en tout état de cause la date la plus ancienne qu’on pût admettre — commencement, milieu ou fin du second siècle, c’est là un écrit d’une haute valeur, et le travail de M. Sabatier, en négligeant ce que nous avons signalé d’exagéré dans son jugement final, est de nature à en donner une idée à la fois très exacte et très complète.

À côté de l’œuvre française si recommandable que nous venons d’apprécier, nous plaçons volontiers l’étude, beaucoup moins étendue, qui nous arrive de Rome, et qui est due à la plume de M. Alexandre Chiappelli[1]. On y trouvera la traduction en italien de la Didaché, accompagnée de notes critiques et précédée d’une préface, courte mais substantielle. L’auteur nous annonce que ce ne sont là que les prémices d’un travail plus étendu. M. Chiappelli, comme M. Labanca, se plaint de l’indifférence de ses concitoyens pour les études de critique religieuse ; l’exemple qu’ils donnent l’un et l’autre, en montrant une connaissance aussi solide des travaux de l’érudition étrangère, n’en est que plus méritoire. Nous sommes convaincus que les efforts de ces estimables savants, non moins que leur persévérance, seront récompensés par l’estime que de pareilles études rencontrent dans un cercle de plus en plus étendu.

C’est de l’autre côté de l’Atlantique que M. Réville nous entraîne en onus offrant le tableau, à la fois animé et nourri, des Religions du Mexique, de l’Amérique centrale et du Pérou au moment de la conquête espagnole[2]. Ce volume fait suite aux Religions des peuples non civilisés, travail absolument réussi, où la patience et l’art de l’auteur ont été couronnés d’un plein succès. M. Réville avait antérieurement donné, comme préface à l’histoire générale des religions qu’il se propose de publier en notre langue, des Prolégomènes, abordant et discutant les principales questions de méthode.

Le plan que M. Réville s’est tracé et dont les premières assises sont seules en place, comporte une sorte de progrès dans l’évolution des idées religieuses, l’auteur nous faisant passer des états inférieurs de la religion à des formes de plus en plus développées, de plus en plus élevées. Ce propos, qui a l’avantage de donner un lien à des faits que la

  1. In-8o, 19 pages. Extrait de la Nuova Antologia.
  2. In-8o de xiii et 413 pages.