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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


Mathias Duval. — Le Darwinisme. Bibliothèque anthropologique Delahaye et Lecrosnier, Paris, 1886.

Notre génération n’a pas été élevée dans la doctrine du transformisme. Ceux d’entre nous que cette doctrine a séduits, ceux même qui la considèrent comme un flambeau dont ils ne sauraient plus se passer, ne sont pas fâchés de retremper de temps à autre leur croyance philosophique dans la source où ils l’ont puisée. Ce n’est pas que cette nouvelle foi qui les éclaire chaque jour risque de s’ébranler comme tant d’autres opinions venues sur le tard ; mais on ne se rappelle que plus ou moins vaguement les innombrables faits qui, à un moment donné, ont entraîné la conviction ; car on s’est surtout imprégné de la vérité générale dont ils sont l’expression, et on aime à les rencontrer de temps en temps comme le voyageur aime revoir le ruisseau où il a pu étancher sa soif. Vous retrouvez toujours, d’ailleurs, dans l’énorme faisceau des preuves du transformisme, quelque fait qui vous frappe d’une façon nouvelle, selon l’orientation actuelle de votre esprit, à ce point que vous croyez l’apprendre pour la première fois.

Aussi les anciens lecteurs des ouvrages de Darwin, tout en gardant toujours sous la main ces admirables livres, se félicitent-ils chaque fois qu’ils voient apparaître l’œuvre du maître sous une forme nouvelle, généralement moins rébarbative que la première. Ils sont heureux de voir cette œuvre grandiose se répandre ainsi de plus en plus et de savoir que les théories de l’évolution et du transformisme vont pénétrer désormais de bonne heure les jeunes esprits qu’elles féconderont d’autant mieux.

À ce double point de vue, de la rémémoration et de l’enseignement, le livre de M. Mathias Duval rendra tout spécialement de grands services, et les lecteurs compétents sauront y reconnaître dans le fond aussi bien que dans la forme, le travail personnel de l’auteur. Ce livre est, en effet, plus qu’un exposé sommaire et lumineux des théories darwiniennes ; les preuves du transformisme y deviennent beaucoup plus frappantes grâce à leur condensation et à leur mode de groupement ; elles sont fortement mises en relief par des aperçus historiques habilement disposés, corroborées par l’addition des données scienti-