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notes et discussions

par la profondeur. Que cette idée soit fournie toute faite par le toucher, ce qui est l’opinion commune, ou qu’elle soit une création de l’entendement, une hypothèse de l’esprit pour expliquer certaines sensations, peu importe ici ; toujours est-il que l’idée de la profondeur dépasse celle du relief, tandis que l’idée de la surface est adéquate à l’idée du visum monoculaire.

Si, d’ailleurs, le relief était une donnée des visa, il figurerait toujours et non pas exceptionnellement dans les images consécutives. Or il n’en est pas ainsi, et il est vraisemblable que des figures géométriques, comme celle que donne M. B. peuvent seules, grâce à la simplicité des lignes qui les composent, produire un relief consécutif.

Sauf dans des cas exceptionnels, comme dans l’expérience ingénieuse décrite par M. B., l’image consécutive est une simple surface ; elle nous fournit même un moyen expérimental très sûr pour écarter la profondeur du nombre des éléments donnés des visa. Regardez un instant devant vous un objet rond, comme une assiette ou une table de café ; fermez les yeux ; l’image consécutive a la forme d’un ovale ; donc vous aviez vu, ce qui s’appelle vu, un ovale ; la forme ronde, et, avec elle, l’idée de la profondeur, qu’elle suppose, avaient été inférées.

Une dernière observation. « L’œil, dit M. B., ne perçoit pas des dimensions absolues, mais seulement des rapports ; » en d’autres termes, il ne mesure pas l’étendue, il la sent. Cela est très juste ; mais le toucher est à peu près dans le même cas ; aucun sens n’est un instrument de mesure. Les sens qui perçoivent l’étendue ne perçoivent que des rapports, et dire qu’ils perçoivent l’étendue, c’est dire qu’ils perçoivent des rapports ; car l’étendue, comme le temps, n’est autre chose qu’un système de rapports. Nous mesurons l’espace et, plus difficilement, le temps ; c’est affaire d’industrie ; mais ils nous sont donnés sans mesure à l’état de simples rapports entre les éléments d’une pluralité donnée.

Victor Egger.

SUR L’IMAGE RÉTINIENNE

Permettez-moi de vous présenter, à propos de l’article de M. Binet sur la perception de l’étendue par l’œil, quelques observations.

L’image rétinienne ne nous donne que des sensations lumineuses. C’est elle qui nous fait dire que l’objet que nous regardons est rouge ou vert, éclatant ou sombre. Elle ne nous donne rien quant à l’étendue.

Si nous regardons fixement le centre d’une croix et si nous disons que nous voyons une croix, c’est que l’impression rétinienne a été associée dans de nombreuses expériences antérieures à la perception des mouvements que doit exécuter l’œil pour que l’axe optique parcoure