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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


À PROPOS DE LA LOI DE WEBER.

Dans ma Critique de la loi de Weber, du nº de janvier 1884 de la Revue, j’ai volontairement omis de discuter la contradiction qui existe entre les conclusions tirées par Fechner des expériences de psychophysique et le principe sur lequel repose la théorie mathématique qui sert, particulièrement en astronomie, à la discussion des erreurs d’observation.

Ce principe, d’après lequel une erreur est d’autant moins probable qu’elle est plus considérable, constitue en fait un postulat assez plausible en lui-même, mais qui ne me paraissait nullement établi sur des expériences probantes. Si donc il était en opposition complète avec la constatation d’un seuil différentiel (Unterschiedschwelle), au-dessous duquel la différence entre deux excitations ne serait pas perceptible, on ne pouvait tirer de là aucun argument décisif, jusqu’à ce que ce principe eût été confirmé ou infirmé par des expériences sérieuses et comparables à tous égards à celles qui ont été poursuivies en psychophysique.

De telles expériences ont été entreprises en Amérique par MM. C.-S. Peirce et J. Jastrow, et ils en ont rendu compte dans une note : On small differences of sensation, publiée par la National Academy of sciences (vol.  III, Baltimore). Ce travail, qui conclut en faveur du principe de la loi mathématique de probabilité des erreurs et contre l’existence du seuil différentiel, me paraît avoir une importance capitale ; mais je ne puis me proposer de l’analyser complètement, et je me bornerai à essayer d’en donner une idée sommaire.

Supposons qu’un sujet soumis à deux excitations très voisines l’une de l’autre, au lieu d’avoir à dire si ces excitations lui paraissent égales ou non, soit au contraire avisé qu’elles sont différentes, mais qu’il ait à se prononcer sur le sens de la différence, fût-il à cet égard dans une indécision complète de jugement.

S’il y a un seuil différentiel, dans toutes les séries d’expériences faites au-dessous de ce seuil, puisqu’il n’y a pas de différence réellement perçue, il y aura autant de probabilité pour une réponse fausse