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LA MÉTAPHYSIQUE DE LOTZE


Si c’est une hardiesse, aujourd’hui, de donner pour titre à un livre de philosophie le simple mot Métaphysique, cette hardiesse n’a pas nui à l’ouvrage de M. Lotze : le voilà déjà traduit en français et en anglais[1]. L’auteur n’a cependant fait aucun sacrifice à la mode et au goût du jour : « Je m’abstiens à dessein, dit-il, d’annoncer, comme on a l’habitude maintenant de le faire dans chaque branche de recherche pour recommander son œuvre, que mon exposition procède d’après la méthode des sciences naturelles[2]… » et il prévoit, dès l’Introduction, qu’il sera conduit à des points de vue où les savants ne consentiront pas à le suivre. Mais les savants consentiraient-ils à faire même un seul pas avec lui, et cette tentative de donner une explication métaphysique du monde, c’est-à-dire de découvrir la cause interne réelle qui rend les phénomènes possibles

  1. M. Lotze, qui est mort le 1er juillet 1881, avait entrepris de présenter ses doctrines en un Système de Philosophie qui devait se composer de trois parties. La Logique et la Metaphysique ont seules paru ; la troisième partie aurait traité sans doute de la Philosophie pratique ; on en a publié quelques fragments d’après les leçons publiques du maître. La Métaphysique (Metaphysik, Drei Bücher der Ontologie, Kosmologie, und Psychologie. Leipzig, Hirzel, 1879) a été traduite en français par M. A. Duval (Paris, Didot, 1883 ; 1 vol.  in-8o de 630 pages), et en anglais par M. Bosanquet (Oxford, 1884), avec la collaboration de MM. Green, Bradley et le Rév. Whittuck. M. Duval, qui a su achever à lui seul cette tâche difficile, avec un zèle et un désintéressement qu’on ne saurait trop louer, nous avertit que l’auteur avait revu le manuscrit de sa traduction, et, se corrigeant lui-même, avait opéré çà et là des changements qui modifient l’expression première de sa pensée. Cet avis est toute la préface du traducteur, et je serais tenté de lui reprocher un excès de discrétion. À la netteté de cette traduction, si fidèle et si scrupuleuse, il est aisé de voir que M. Duval aurait pu nous donner une excellente étude sur le livre de M. Lotze. Il s’est dérobé avec trop de modestie. Les traducteurs anglais ont du moins ajouté à leur œuvre une table où chaque paragraphe est résumé en une ligne, et un index. Ils n’ont pas craint non plus de couper les paragraphes trop longs en alinéas qui les rendent plus faciles à lire et ils ont donné toute la précision désirable aux renvois, souvent trop sommaires, qui se rencontrent dans le texte.
  2. Introduction, page 10 de la traduction française.