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société de psychologie physiologique

présenta sans succès un flacon de tabac en poudre, mais nous avions prévenu déjà que le tabac, la nicotine ne produisaient rien, ce que nous supposions dû à l’usage habituel du tabac à fumer. Un autre flacon, présenté par un des assistants, produisit quelques vomissements, de la salivation, un peu de diaphorèse. C’était du jaborandi. Toute la réunion fut témoin d’une superbe ivresse alcoolique ; puis un tube que nous croyions contenir de la cantharide donna l’action de la valériane. Toute l’assistance fut témoin de notre stupéfaction et reconnut l’erreur. La valériane et la cantharide étaient dans des tubes semblables, qui avaient été pris l’un pour l’autre. Cette erreur est des plus significatives.

C’est à ce moment, juin 1885, que V… fut envoyé à l’asile de Lafond (La Rochelle). Là, notre confrère M. le médecin en chef Mabille a répété et continué ces recherches. Son concours, son témoignage nous ont été des plus précieux ; sa complaisance nous a permis de les poursuivre parallèlement sur les deux sujets.

Sur la femme Victorine M…, l’eau de laurier-cerise a produit une extase religieuse prolongée avec visions, suivie de convulsions thoraciques et diaphragmatiques. Ce phénomène fut si surprenant et si beau que, non contents de le renouveler à plusieurs reprises, nous avons varié les essais. Par comparaison, nous avons présenté l’essence de mirbane diluée qui, comme on sait, est de même odeur que l’essence d’amande amère, quoique de composition bien différente. Il était impossible que l’odorat ne s’y méprît pas ; l’extase religieuse ne s’est pourtant pas produite. D’autre part, une solution faible d’acide cyanhydrique ou de cyanure de potassium a amené les convulsions diaphragmatiques et thoraciques, pendant que la solution diluée d’huile volatile de lauriercerise donnait l’extase religieuse seule sans convulsions à la suite. Nous avions fait ainsi l’analyse de l’eau de laurier-cerise. Toutes les essences, les éthers, ont amené des hallucinations variées. L’essence d’absinthe a produit une épilepsie spinale caractérisée.

Nous avons varié aussi les alcools. L’alcool éthylique donnait une ivresse gaie ; l’amylique, une ivresse furieuse ; l’aldéhyde, une ivresse sombre ; une bouteille de champagne, une scène pleine d’entrain, avec danses, chants joyeux.

Nous terminerons cette série par deux applications thérapeutiques de la méthode, qui n’ont jamais manqué leur effet brillant.

Le valérianate d’ammoniaque en solution diluée arrête instantanément les attaques convulsives les plus violentes. Le camphre fait disparaître les contractures.

Nous prions nos confrères de vouloir bien rechercher ces actions et, dans les crises d’hystérie, présenter quelques instants, en un point quelconque du corps, un flacon de valérianate d’ammoniaque bouché, car l’odeur est flagrante, et la dose, pour être calmante, doit être des plus ménagées. Près des membres contracturés, qu’ils présentent un flacon ou un morceau de camphre, et nous avons bon espoir qu’ils verront l’accident se dissiper à l’instant.