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société de psychologie physiologique

lument, sans daigner s’expliquer davantage. D’autres regardaient V….. comme un habile simulateur qui se jouait de nous.

Tous les médecins qui ont manié des hystériques, qui ont fait de l’hypnotisme, de la suggestion et autres pratiques analogues, savent parfaitement qu’il est toujours possible de dépister la simulation. Nous ne nous attarderons pas à le démontrer.

Ces procédés à notre égard ne pouvaient nous laisser indifférents, venant de personnes dont nous devions attendre de la bienveillance, mais ils ne pouvaient nous arrêter un instant, car nous savions que c’est l’accueil réservé à toute idée vraiment nouvelle qui trouble la douce quiétude de la routine. Nous savions, du reste, que ces attaques n’avaient point été épargnées aux Burq, Liégeois, Azam et autres ; en si bonne compagnie, nous pouvions passer outre.

D’autres objections, celles-ci scientifiques, nous étaient faites en même temps ; nous sommes loin de les dédaigner, nous y reviendrons plus loin. Il est préférable auparavant de continuer l’exposition des faits.

Un de nos collègues de l’École, M. Cunisset, professeur de physique, prépara deux paquets qui furent présentés sans que nous sachions ce qu’ils renfermaient. Le premier fit dormir, avec bâillements et nausées au réveil : il contenait de l’opium. Le second produisit une brûlure intolérable : c’était un sel de mercure. Nous considérons cette expérience comme étant d’une très grande importance.

À ce moment, on nous signala en ville une femme nommée Victorine M…, atteinte de grande hystérie.

Ayant examiné cette femme, nous nous sommes assurés de la réalité de sa maladie ; elle était analgésique à droite et hyperesthésiée à gauche ; nous avons pu la faire passer par toutes les phases du grand hypnotisme à l’aide des moyens les plus variés. Ces constatations faites, nous avons essayé les médicaments.

Un paquet de chloral, après cinq minutes d’application sur la tête, a amené un sommeil calme avec réveil facile.

Un fragment d’iodure de potassium, sur le front et la nuque, amène des bâillements répétés, mais pas d’éternuement. Un morceau d’opium la plonge dans un sommeil profond avec réveillent.

Une feuille de jaborandi sur le front donna du sommeil, du hoquet, du mâchonnement, de la salivation et le goût sucré de la cigarette, avec sensation de chaleur et moiteur de la peau.

Nous avions donc deux sujets qui réagissaient d’une façon semblable, ce qui nous permettait de comparer et donnait une plus grande portée aux résultats acquis.

Un jour l’un de nous, traversant le jardin botanique, cueille quelques feuilles et fleurs de valériane, les enveloppe de papier et, bientôt après, les place dans la main de V… Celui-ci tombe d’abord en sommeil tranquille, mais bientôt et tout à coup il se lève ; les yeux ouverts, la