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société de psychologie physiologique

victime. Il niait très résolument de lui avoir fait toute autre sorte de violence.

Sed… eut le bonheur de trouver des magistrats aux entrailles paternelles. L’outrage à la pudeur fut exclu, et même, malgré sa confession, on alla jusqu’à dire qu’il n’y avait pas de preuve de la préméditation. C’est pourquoi l’accusation fut de simple meurtre. Le jury, ne voulant pas se montrer moins tendre que les magistrats, lui accorda des circonstances atténuantes, ce qui ne le fit condamner qu’à cinq ans de réclusion. Il sera libre de recommencer ses crimes dès l’âge de vingt-trois ans.

Examen psychologique. — Il s’agissait évidemment d’un viol suivi de meurtre, ce qui est confirmé par ses habitudes impudiques, qui obligèrent la direction de l’établissement à l’isoler complètement.

Voilà donc un sujet qui tour à tour se révèle voleur, sanguinaire, pédéraste et assassin. Tout cela avant l’âge de dix-huit ans. Il y a donc absence complète de tous les instincts moraux élémentaires qui forment ce qu’on appelle sens moral.

Il répondait à mes questions d’une manière indifférente, apathique, sans tâcher le moins du monde de s’excuser, comme s’il n’en valait pas la peine, excepté pour le viol, qu’il s’entêtait à nier. Le meurtre de l’enfant lui paraissait une affaire très insignifiante. Le plus profond égoïsme m’a été révélé par les seules préoccupations qu’il avait de sa santé un peu détériorée et de la date où sa détention devait avoir un terme. Il ne faisait que me questionner à cet égard, pendant que je tâchais de lui représenter l’horreur de son crime.

Examen anthropologique. — Il avait le regard froid, l’œil fixe, traits caractéristiques de l’assassin. Son crâne était plagiocéphale et sa figure présentait un défaut de symétrie très remarquable. Il avait enfin le front petit et fuyant, et un prognathisme exagéré, traits qui sont les plus saillants dans les races inférieures et dégénérées[1].

2o Le deuxième cas n’est pas moins intéressant, quoique moins compliqué. Ner…, un jeune homme, à dix-huit ans fut condamné à quinze francs d’amende pour avoir fait des dégâts sans aucun but d’utilité personnelle, mais par pur instinct de vandalisme. L’année suivante, le tribunal lui infligea trois ans de prison pour menaces et blessures. Il obtint la liberté provisoire et, pendant ce temps, fut déclaré apte au service militaire, qu’il aurait dû commencer après l’expiation de sa peine.

Le jour où il apprit cela, il dit à un de ses amis : « Il me faut passer trois ans en prison et trois à l’armée ; j’aime autant le bagne ; c’est pourquoi je m’en vais tuer quelqu’un. » Le soir il monte sur un char à bancs, et, prenant les rênes, il lance le cheval au galop, se croise avec

  1. Le professeur Virgilio, directeur de la maison d’Aversa, ayant eu la bonté de m’accompagner dans cette visite et presque toutes les suivantes, relevait en même temps l’indice céphalique, mais j’omets ces mesures, qui n’ont pas beaucoup d’importance pour l’anthropologie criminelle.