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conformité complète avec celles de la Salpêtrière. Les noms de ces deux savants italiens ne sont même pas prononcés. De plus, la description du grand hypnotisme est trop écourtée. Alors même qu’on voulait la présenter sous une forme élémentaire, il aurait fallu rappeler les modifications que la léthargie, la catalepsie et le somnambulisme impriment à la courbe respiratoire. M. Cullerre ne paraît pas attacher une grande importance à ces phénomènes physiques ; évidemment il n’a pas compris qu’ils constituent la partie neuve de la question.

Après le grand hypnotisme, l’auteur traite du petit hypnotisme en suivant pas à pas la description de M. Bernheim. Il nous semble qu’en abordant une série de phénomènes qui ne sont pas encore entrés dans le domaine scientifique il aurait été sage de faire quelques réserves. Nous aurions aussi des critiques à adresser au chapitre où il est traité de la suggestion hypnotique. On n’y trouve pas de théorie de la suggestion ni de classification des effets suggérés. C’est une réunion d’anecdotes amusantes dont la plupart sont empruntées à M. Bernheim. Tout cela aurait pu s’écrire il y a quarante ans.

Nous passons rapidement sur les autres chapitres (physiologie de l’hypnotisme, applications à la thérapeutique) où l’on ne trouve rien d’inédit. Le livre se termine par une étude médico-légale sur l’hypnotisme ; c’est une sorte de décalque de la brochure de M. Liégeois sur le même sujet. Il est regrettable que la question de savoir à quelles conditions les juges peuvent admettre la réalité de l’état hypnotique chez un prévenu ou chez un témoin ne soit même pas posée. En terminant, nous nous plaisons à reconnaître que le livre est bien écrit, d’un style ferme et quelquefois pittoresque. L’auteur eût été certainement capable de nous donner un bon traité de l’hypnotisme, s’il avait été plus maître de son sujet. En lisant certaines parties de son œuvre, qui sont assez fortement pensées, on acquiert la conviction qu’il aurait pu mieux faire.

A. Binet.

La Grande Encyclopédie, in-4. Paris, Lévy.

Nous sommes en mesure de répondre par quelques indications précises aux questions qu’on nous pose de différents côtés sur la Grande Encyclopédie, qui commence à paraître en ce moment par fascicules hebdomadaires. Le sous-titre de cette publication en annonce clairement, sinon très élégamment, le but et la portée : c’est un « inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts » ; quelque chose comme un nouveau Dictionnaire universel, mais autrement conçu et qui semble devoir être beaucoup plus complet que tout ce qui a encore paru en ce genre. Cet immense répertoire de faits et d’idées n’aspire à rien moins qu’à présenter en raccourci l’état des connaissances à la fin du xixe siècle.

Non l’état des connaissances seulement, mais plus encore l’état des esprits : ce sera le trait de ressemblance de l’Encyclopédie nouvelle avec celle du siècle dernier, ressemblance qui entraîne d’ailleurs des