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ANALYSES.ogereau. Le système philosophique des stoïciens.

plusieurs autres points, entre les divers membres de l’école, des désaccords qui nous paraissent importants et que nous regrettons de ne pas trouver mentionnés et discutés dans le livre de M. Ogereau. Ont-ils échappé à l’auteur ou a-t-il cru devoir les négliger ? Nous l’ignorons ; mais, à notre avis, leur absence est un défaut. Nous appellerons spécialement l’attention de l’auteur sur les doctrines de Panétius et de Posidonius qu’il ramène trop complètement peut-être à l’orthodoxie stoïcienne, sur les derniers représentants de l’école qui nous semblent capables de lui fournir un certain nombre de considérations nouvelles, non moins intéressantes que celles qu’il nous a présentées.

Nous avons hâte de laisser de côté la critique pour indiquer ce qu’il y a d’intéressant et d’instructif dans l’ouvrage de M. Ogereau. Le premier chapitre est à coup sûr un de ceux qui méritent le plus d’attirer l’attention. Le portrait de Zénon, l’examen des sources de sa doctrine sont faits avec une grande exactitude historique ; Chrysippe est considéré d’une manière très ingénieuse, et l’auteur a justifié sa manière de voir par un certain nombre de textes très intéressants et très bien choisis.

On ne lira pas avec moins d’intérêt les chapitres qui traitent de l’être, du monde et de l’homme : les doctrines de la génération et de la destruction de l’univers, de la nature de l’âme, de l’apparition de la raison dans l’homme sont exposées avec autant de clarté que d’exactitude. Nous signalerons, dans le chapitre où il est question du critérium de vérité, ce qui concerne la représentation sensible (p. 111) : l’auteur explique d’une façon très ingénieuse, sinon absolument exacte, les définitions que Zénon, Cléanthe et Chrysippe donnaient de la représentation sensible. Il convient encore de noter la discussion sur la représentation compréhensive considérée comme un critérium de vérité ; le rapport établi entre les représentations compréhensives et les actions convenables, entre la compréhension et l’action droite, la science et la vertu.

M. Barthélemy Saint-Hilaire pensait que les parties qui traitent de la dialectique et de la morale étaient peut-être les meilleures de tout le mémoire : on y trouve, disait-il, des aperçus nouveaux sur les rapports du bien et, du beau, et dans ces questions si souvent agitées, des rapprochements assez justes entre la controverse de Carnéade et de Chrysippe sur l’optimisme, et celle de Bayle et de Leibnitz sur le même sujet. Nous signalerons pour notre part dans le chapitre sur la dialectique la distinction entre le mot, la pensée et l’exprimable (τὸ λέκτον), l’examen du jugement, les rapports entre les stoïciens et Aristote à propos de la définition et de la division des quatre genres que les stoïciens ont voulu substituer aux dix catégories d’Aristote, de la division en jugements simples et en jugements composés. Nous nous permettrons cependant sur ce sujet, où l’auteur devra être consulté par ceux même qui auront déjà lu l’ouvrage classique de Prantl sur la logique ancienne, de trouver que sa conclusion est fort sévère pour le stoï-