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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


C. E. Adam.Essai sur le jugement esthétique. — 1 volume in-8o, 255 pages, Paris, Hachette, 1885.

Voici encore un livre sur l’esthétique. Après M. Sully-Prudhomme, M. Séailles et M. Guyau, dont la Revue a analysé les ouvrages, M. Adam soulève à son tour ces difficiles questions. Rendons tout d’abord hommage à l’ordonnance du livre. L’auteur nous apparaît à première vue comme un esprit qui affectionne la clarté, méthodique, ami de l’ordre et même d’un ordre un peu compassé. Voici l’analyse rapide de son ouvrage.

Quand nous jugeons qu’un objet est beau ou laid, nous formulons un jugement que Kant a nommé jugement de goût. Le plaisir que nous éprouvons en face de la beauté, la peine que nous ressentons en face de la laideur sont des émotions esthétiques. Ces émotions ne sont pas purement sensibles ; le beau ne peut se confondre avec l’agréable. Sans doute le sentiment du beau est immédiat comme tous les autres plaisirs ; mais ce qui nous agrée surtout, c’est plutôt la forme des choses, leur disposition, leur ordre, que les sensations qui nous affectent en leur présence. M. Adam va même jusqu’à dire qu’on « aurait tort, croyant peut-être rendre plus vif le sentiment du beau, d’y ajouter quelque plaisir des sens (p. 9), ce qui semble bien dépasser la vérité. »

Le plaisir esthétique se distingue aussi des plaisirs de l’intelligence. Le beau n’est pas la même chose que le parfait ; il n’y a point de règles logiques selon lesquelles le beau se montre toujours. M. Adam va même si loin dans ses distinctions qu’il nie l’idéal dont il reconnaîtra plus tard l’existence (ch.  ). Il lui semble que l’idéal de l’homme, par exemple, ne serait qu’une moyenne (p. 17), « c’est-à-dire l’homme ramené à ses traits généraux et essentiels, une ébauche de tel ou tel homme en particulier. L’idéal ainsi compris est moins une forme vivante qu’un squelette desséché. » Mais, dirons-nous, les expériences de Galton sur les images composites n’ont-elles point montré que, plus était grand le nombre d’images composantes, plus était belle l’image composée ? Et cela ne prouve-t-il point que le général, loin d’être exclusif de la beauté, en est au contraire l’essentielle condition ?

Les sentiments moraux, continue l’auteur, ne peuvent non plus se confondre avec les sentimente esthétiques. Il y a sans doute dans les