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CH. FÉRÉ. — sensation et mouvement

fatalement, non seulement à toutes les excitations qui peuvent l’atteindre directement, mais à toutes les sensations perçues ou non, à toutes les représentations mentales de sa mère. Quand il vient au monde il a déjà un avant-goût de la prétendue liberté dont il va jouir.

Quel est le mécanisme de ces mouvements dits actifs du fœtus ? Il est, semble-t-il, assez simple. Les faits que nous avons rapportés précédemment montrent que toute excitation détermine des contractions non seulement des muscles de la vie de relation, mais encore des muscles de la vie organique (vaisseaux, intestins, vessie, etc.) : il est certain que les fibres musculaires de l’utérus se contractent aussi. Le fœtus subit dans toute sa substance les effets de la compression déterminée par cette contraction chaque fois que la mère est soumise à une excitation quelconque ; et il en témoigne à sa manière par des mouvements de défense variables en intensité.

L’organisme maternel réduit pour le fœtus les excitations lumineuses, sonores, tactiles, etc., à une forme élémentaire commune, le mouvement, qui est bien évidemment dans cette circonstance la commune mesure des sensations. Pour le fœtus, les excitations et les réactions qu’elles déterminent ne peuvent se distinguer que par la forme des contractions musculaires qui, comme nous l’avons déjà vu, est capable de caractériser les sensations de couleur, d’odeur, et peut-être de timbre, etc. Après la naissance, l’enfant acquiert graduellement la connaissance de ces modifications de forme, et il les distingue de mieux en mieux ; mais, si la sensibilité consciente se développe, rien ne change au fond, et le mouvement reste la commune mesure des sensations et leur substratum nécessaire : Nous ne connaissons les objets extérieurs que par les réactions motrices qu’ils provoquent dans notre organisme tout entier.

Si les quelques faits que l’on connaît, relatifs aux circonstances dans lesquelles se produisent les mouvements du fœtus, sont capables d’établir qu’il ressent toutes les excitations auxquelles la mère est soumise, on comprend que ces circonstances méritent considération au point de vue de l’hygiène.

L’hérédité de la dégénérescence est aujourd’hui un fait des mieux établis, de même que son aggravation progressive ; et la localisation de la prédisposition morbide peut être influencée par un accident de la conception ou de la gestation[1]. Mais chez quelques dégénérés on ne peut saisir aucune trace de vices héréditaires, et il faut chercher une autre cause. Les observations que nous venons de rapporter per-

  1. Ch. Féré, La famille névropathique (Archives de neurologie, 1884, janvier et mars).