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traire : le concept de qualité et celui de quantité lui semblent irréductibles. L’intensité d’un son peut-elle croître à l’infini ? On peut concevoir un tel accroissement, mais, passé une certaine limite, on ne le peut percevoir ; cette limite de perception ou plutôt de perceptibilité, pourrait-on dire si le mot était français, varie selon les personnes. L’intensité d’un son peut-elle décroître à l’infini ? Non, répond M. Stumpf. Le concept d’intensité implique une limite de décroissance objective.

Quant à la « continuité » des intensités, on y a cru sans se demander jusqu’à quel point l’hypothèse contraire était inadmissible. Ne se pourrait-il pas, cependant, qu’une force continuellement croissante, comme celle dont dépendent les intensités diverses, ne produisît ses effets que par sauts ?

Voici quelques-unes des conditions susceptibles d’influer sur la certitude des jugements d’intensité.

Plus les excitations sont fortes, plus il faut de différence entre elles pour noter avec certitude celle des intensités. — La disposition individuelle et momentanée de l’organe joue ici un rôle. Cette disposition varie beaucoup plus à l’égard de l’intensité qu’à l’égard de la qualité. Le soir, la sensibilité de l’oreille augmente ; elle peut varier brusquement selon l’état du pouls. Enfin l’oreille se fatigue plus lentement que l’œil, sauf dans les cas d’explosions violentes ; et plus vite elle recouvre sa sensibilité. Suivant qu’on est préparé ou non à entendre un son, on lui attribue plus ou moins de force.

Voici maintenant des différences qui relèvent de la catégorie de temps : 1o Le jugement d’intensité est indépendant des petites variations d’intensité de la sensation, dès que celle-ci atteint une certaine durée ; 2o la certitude du jugement varie suivant l’intervalle qui sépare les sensations dont il s’agit de comparer la force ; 3o le degré de certitude du jugement varie selon que le bruit le plus fort est entendu le premier ou le second ; 4o un jugement d’intensité a d’autant plus de certitude qu’on tient plus de compte de l’inégale sensibilité des deux oreilles, et qu’en raison de cela on se sert de la même oreille après une pause suffisante.

Plus les timbres de deux sons diffèrent, plus il devient difficile d’apprécier exactement leurs intensités relatives. La hauteur, aussi, influe sur la certitude de ces jugements. À intensité d’excitation égale, les sons hauts paraissent avoir plus d’intensité que les sons bas. Cela tient, sans doute, à la nécessité où nous sommes de dépenser plus de force quand nous voulons faire entendre des sons plus élevés.

Comment l’attention influe-t-elle sur les jugements d’intensité ?