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ANALYSES.a. posada. Introduction au droit politique.

guère celle des revendications. Aussi les œuvres qui, chez nous, auraient le plus de portée politique, ne se recommandent plus de la politique même ; elles paraissent sous le couvert d’investigations économiques, sociales, et bien plutôt sociologiques. Il faut dire aussi que les progrès accomplis par la psychologie et la physiologie sociales, en un mot par la sociologie, science sœur de la politique, sont faits pour tempérer les velléités d’écrivains qui n’ont que le tempérament et le bagage des politiciens purs. L’œuvre étrangère, et assez estimable, que je signale à nos lecteurs, n’est elle-même, malgré son titre, qu’aux trois quarts politique ; la sociologie y est au moins pour un bon quart.

Le livre de M. Posada est une sorte d’introduction à la science politique. Mais cette étude préparatoire est si étendue dans quelques-unes de ses parties, qu’elle peut être considérée comme un véritable traité de droit politique. L’auteur étudie successivement ce droit dans son idée, dans les faits de l’histoire, dans les moyens dont l’homme d’État dispose pour l’organiser, dans l’État qui en est l’organe et l’instrument, enfin dans les rapports naturels et essentiels de cet organisme avec tous les autres organismes vivants. Autrement dit, il nous invite à voir ce qu’est le type de l’État en lui-même, indépendamment des temps et des lieux, mais dans les conditions infiniment variables qui président à sa formation. Il prétend se dégager, et il y réussit presque toujours, de toute conception a priori, soit psychologique, soit physiologique. Ni empirisme, ni idéalisme, telle est sa devise. Il ne craint pas d’ailleurs de recourir aux données de l’expérience qui lui paraissent pouvoir mettre en relief ses arguments. Peut-être même lui reprochera-t-on d’en avoir abusé, et d’avoir trop vu la philosophie de l’histoire à travers Macaulay et Taine, d’avoir prêté à tel de nos romanciers, soit Balzac, soit Zola, une valeur excessive, quant à la description du moment social. Mais à quoi bon insister ? Il ne faut juger ni les gens ni les auteurs par leurs faibles côtés ; et si M. Posada laisse à désirer dans le développement des principes, s’il pouvait difficilement trouver à faire du neuf et du très bon dans l’examen des facteurs externes des faits politiques, il a pourtant étudié très sérieusement les deux chapitres qu’il consacre au droit politique comme objet d’art et à l’État comme organisme. De ces deux chapitres, le premier nous offre un intérêt plus pratique, et le second un intérêt plus philosophique. Aussi donnerai-je une plus grande importance à l’analyse du second.

L’État est l’organe du droit. Il fournit aux hommes les moyens de l’atteindre comme fin. Le droit est d’ailleurs, pour M. Posada (et il faut le féliciter de ne pas avoir cherché une définition métaphysique), tout ce qui est utile à chacun pour atteindre ses fins de toute sorte, en tant que cette recherche des fins individuelles ne nuit pas aux fins des autres. Prenant les choses d’un peu loin, l’auteur nous montre, à partir du simple mouvement jusqu’à la société la plus élevée, cette évolution universelle des moyens aux fins. Cette relation universelle se particu-