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Cratyle, le Sophiste, le Politique, le Philèbe, le Parmènide et le Ménon sont d’une date encore plus récente. Il paraîtra difficile après cela de les regarder comme des œuvres authentiques de Platon. Tant qu’on persistera à rapporter le Parmènide, le Sophiste et le Philèbe au même auteur que le Phèdon, la République et le Timée, l’unité de la doctrine platonicienne ne pourra être sérieusement soutenue. Ce n’est pas un médiocre mérite pour Teichmüller d’avoir contribué à dissiper des erreurs séculaires. Il est regrettable pourtant que sa polémique contre Zeller se produise sous une forme trop acerbe au commencement du livre.

Max Peschel : Aphorismes sur la philosophie kantienne, avec l’indication d’un point de vue positif et métaphysique. Bâle, Schwabe, 1879. L’auteur fait ressortir les lacunes et les inconséquences de la doctrine critique, et croit en trouver le complément et le correctif dans l’idéalisme absolu de Hegel. On est étonné de cette foi persévérante de l’auteur dans un système contre lequel la critique et la science de notre siècle ont multiplié leurs coups à l’envi.

Gustav Knauer : L’âme et l’esprit. (Suite.) L’auteur commence par déterminer le concept de l’âme et par rechercher quelles sont les facultés psychiques que les bêtes ont en partage avec nous. Elles sentent, perçoivent, ont des conceptions, sont douées de conscience, ont le sentiment de leur individualité, désirent, sont affectées comme nous. Ce sont là autant de facultés de l’âme. L’âme qu’elles manifestent est périssable comme le corps : il faut donner raison aux sensualistes sur ce point. L’âme ainsi définie est l’objet propre du psychologue. Rien ne s’y rencontre qui ne se trouve déjà à un degré inférieur dans l’animal. Inutile jusqu’ici de recourir à un principe nouveau, que l’on désignerait sous le nom d’esprit. Où donc trouver ce dernier ? Ce n’est pas dans la faculté de raisonner, qu’on découvre aussi chez les animaux. Il faut le chercher dans la conscience morale. Avec elle apparaît dans l’homme un principe supérieur, qui nous élève au-dessus de la réalité sensible, jusqu’aux idées du devoir, de la liberté, de l’éternité, de Dieu. L’homme est essentiellement l’être capable de concevoir de telles idées, auxquelles la bête demeure absolument étrangère, et voilà pourquoi il est un esprit. « Tandis que la psychologie est une science expérimentale en rapport étroit avec la zoologie et les sciences naturelles, et absolument indépendante de la métaphysique, l’étude de l’esprit ou la pneumatologie est essentiellement une recherche métaphysique, qui s’appuie sur la critique pour s’élever aux idées absolues. » On ne pourra en finir avec le matérialisme et réconcilier la philosophie et la science qu’autant qu’on maintiendra rigoureusement la distinction de la psychologie et de la pneumatologie. Les livres chrétiens ont devancé sur ce point les enseignements de la réflexion philosophique. Le rôle de l’esprit (πνεῦμα) y a toujours été soigneusement séparé de celui de l’âme, du principe de la vie sensible. La philosophie doit s’interdire d’analyser, de définir l’esprit ; la foi seule en saisit et affirme