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LES FORMES VISUELLES

ET LE PLAISIR ESTHÉTIQUE


On répète souvent que le plaisir de la forme, par opposition à celui de la couleur, est un plaisir intellectuel provenant d’une perception de rapports (unité dans la variété, proportion, etc.). En un sens, cela est vrai ; car, ainsi que j’espère le montrer dans le courant de cet essai, l’appréciation de la forme, quand on la compare au plaisir de la couleur, est saturée, pour ainsi dire, d’une activité intellectuelle d’un genre plus raffiné. Mais ce simple fait que l’un des arts de la forme, à savoir le dessin des contours, se passe non seulement du plaisir de la couleur, mais encore de celui de la lumière et de l’ombre, ce simple fait nous donne à penser que le plaisir de la forme visuelle comprend un élément sensoriel aussi bien qu’un élément intellectuel. Ce sera spécialement mon but, dans cet article, de mettre en relief ce facteur un peu négligé de la jouissance visuelle, et, autant que possible, d’en indiquer l’importance parmi les facteurs qui composent, réunis, ce que nous appelons la beauté de la forme.

En poursuivant cette recherche, il vaudra mieux laisser de côté la jouissance sensorielle de la lumière et de l’ombre.Pour notre présent objet, les différences d’ombre et de lumière sont simplement des moyens d’apprécier la forme. De même, il sera sage de considérer toutes les variétés de la forme comme déterminées par les trois dimensions de l’espace. Il est vrai que la beauté de la forme, en tant qu’elle repose sur des sentiments purement visuels, n’est, en grande partie, que la beauté des rapports de surface, ou d’espace à deux dimensions. Cependant on remarquera qu’il est pratiquement impossible de traiter de celle-ci, si on la sépare de cette autre espèce de beauté de forme qui comprend le charme de la distance et de la perspective et l’attrait caractéristique des figures solides. Pour ce qui est de l’ordre des matières, nous commencerons par les élé-